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Rétrospective 2020 : Les meilleurs films de l'année

Par La rédaction

Comme il nous appartient d’écrire sur le cinéma et pas sur la gestion de la santé publique, autant dire que le premier constat à poser pour cette horrible année venant de se terminer est qu’il y avait longtemps qu’autant de personnes ne s’étaient tournées collectivement, en même temps, vers le cinéma afin d’y chercher réconfort et fuite du monde. C’est ainsi peut-être le confinement, avec ses marathons de films (re)découverts, de quelques festivals à la carte et d’échanges virtuels qui a graduellement formé les constats que nous soulevons dans les 30 textes qui suivent. C’est aussi peut-être le cinéma qui l’avait prédit, puisque tous ces films étaient déjà tournés, prédit qu’on aurait tant besoin de lui, que nous en étions rendus-là, dans un clivage si violent entre la décennie précédente et celle-ci, à constater que ces nouveaux films ont d’immenses choses en commun qui les veinent l’un à l’autre comme un portrait nous semblant à la fois révélateur de l’année 2020, de ce qu’elle a demandé de nous, et de notre regard collectif à son endroit ; un instantané de l’année qui vaille en soi et pour la revue, qui a continué d’afficher une position de front cette année encore (à Rotterdam et Berlin, deux semaines à peine avant le 1er confinement), intéressée à la cinéphilie internationale, à notre position nationale, québécoise, dans celle-ci, mais aussi notre capacité à saisir l’actualité afin d’ouvrir sur des questions qui nous semblent absolument cruciales, même si elles sont encore absentes du discours médiatique général (notre numéro double sur Black Lives Matter, articulé autour de la matérialité de la couleur de la peau au cinéma ; notre numéro sur la cinéphilie de confinement et ses principes d’immunité collective ; notre numéro sur les espaces rêvés auxquels nous ouvre le cinéma), certes des numéros de front, mais aussi des numéros où l’on a voulu mettre le cinéma au-devant de nous, le laissant penser le monde et nous-mêmes, moins comme un miroir complaisant qu’à la manière d’un phare bienveillant nous permettant de nous y retrouver, de ne pas trop nous éloigner, de ne pas trop nous rapprocher non plus, de longer plutôt, la pandémie, le cinéma, la culture, qui a du apprendre à vivre dans cet entre-deux de récifs au risque de ne plus vivre du tout.

30 textes pour 30 films, où nombreux sont ceux à avoir voulu renouveler le bagage sensoriel du cinéma, sa manière d’incarner le sentiment à l’écran, de l’éponger par ses coupes, son mixage, son grain, un retour du sensoriel par-devant le formalisme (de Prière pour une mitaine perdue et Viendra le feu à Undine, Babyteeth, Never Rarely Sometimes Always, Sound of Metal ou Portrait de la jeune fille en feu), présentant tous des occasions de revoir notre rapport à l’autre à la lumière d’un impressionnisme sincère et empathique, où le cinéma d’auteur semble définitivement sortir de la suprématie du cadre et de sa lenteur pour préférer de nouvelles vivacités sonores et montagières. Aux côtés de cette tendance, celle, rapprochée, des reconsidérations historiques, toutes ces entreprises consacrées, dans un mouvement rétrospectif qui n’a d’ailleurs pas cessé de hanter le confinement, à visibiliser les enjeux de l’Histoire, de sa transmission collective et de la guérison sociétale qu’elle invite (de Me and the Cult Leader à Irradiés en passant par Zombi Child, City Hall, Labyrinth of Cinema et Small Axe). Enfin, une dernière tendance frappante, à cheval entre l’introspection et l’historique, soit celle du contexte toxique,  inquiétant, ignorant, désespérant, de l’a priori historique et formel guettant la noyade intérieure telle qu’elle se vit lorsqu’on s’enfonce dans le monde pour le (re)trouver à mesure qu’on le voit s’éloigner (She Dies Tomorrow ou Another Round ou King of Staten Island, voire The Woman Who Ran, Nomadland et Dwelling in the Fuchun Mountains). Trois tendances à retenir de l’année 2020, toutes étirées par la dilatation de nos immobilismes respectifs, comme s’ils nous avaient rendus encore plus conscients de la potentielle hostilité du monde et de la nécessité renouvelée, pour le cinéma, mais aussi pour notre revue, de la réfléchir par tous les moyens qui sont à sa disposition.

Voici donc les 30 films autour desquels la rédaction s’est concertée, 30 films qui nous animent pour vous montrer la vivacité du cinéma dans une année occultée, des œuvres à investir, à noter, à chasser, hélas encore chacun pour soi, afin de préserver la courroie du désir intime de la cinéphilie, seul amour à pouvoir se galvaniser d’un confinement.  
 

 
Présentation  |  30-21  |  20-11  |  10-1  |  Palmarès individuels

 

illustration : François Samson-Dunlop

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Article publié le 1er février 2021.
 

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