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Rétrospective 2013 : Les meilleurs films de l'année (25-21)

Par Panorama - cinéma



MAN OF STEEL
Zack Snyder  |  États-Unis  |  2013

Blockbuster mal-aimé, sans doute victime de son absence marquée de cynisme à une époque où tout ne semble exister qu'au second degré, Man of Steel se révèle pour peu que l'on veuille bien lui accorder l'attention qu'il mérite l'un des grands films populaires de l'année 2013. Critique du patriotisme belliqueux doublée d'une fable environnementaliste, épopée christique sur fond de transcendantalisme américain, cette relecture humaniste du mythe de Superman aborde avec intelligence et sensibilité les vastes enjeux qu'implique son récit épique. Par-delà la mécanique hollywoodienne se cachent d'ailleurs un montage complexe et audacieux de même qu'une mise en scène aux registres multiples – couronnée par une séquence finale dont l'ampleur apocalyptique dépasse l'entendement. Jamais, depuis le 11 septembre 2001, la destruction d'une ville au cinéma n'avait pu paraître si symphonique, si cathartique qu'ici, tandis que le film, invitant l'Amérique à enterrer la hache de guerre, se terminait par un ultime affront de son héros cosmique qui, refusant d'être assujetti à l'autorité de l'ordre militaire, abattait un drone. Le sort de l'humanité, affirme ainsi Man of Steel, est trop précieux pour être placé entre les mains de soldats.

Texte : Alexandre Fontaine Rousseau




A FIELD IN ENGLAND
Ben Wheatley  |  Royaume-Uni  |  2013

Avec son quatrième long métrage, le réalisateur anglais Ben Wheatley se sera passablement éloigné de la structure narrative classique pour nous immiscer au coeur d’une quête sensorielle complètement déjantée. Marqué par l’un des moments de cinéma les plus dangereux pour tout individu souffrant d’épilepsie, A Field in England impressionne constamment grâce à des séquences aussi hallucinées qu’hallucinantes et les prestations d’une distribution complètement possédée. Un véritable ovni cinématographique auquel les mots seuls ne sauraient rendre totalement justice et qui doit tout simplement être vu pour que sa puissance puisse être comprise et assimilée. Après Kill List et Sightseers, A Field in England vient affirmer une fois de plus la force brute qu’incarne Wheatley dans le paysage actuel du cinema d’auteur. Que ce soit pour l’alchimie, les nombreuses quêtes farfelues de ses personnages ou encore les champignons magiques, cette expérience filmique s’avère aussi impressionnante que les jurons anglais sortant de la bouche de ses déserteurs.

Texte : Maxime Monast




THE CONJURING
James Wan  |  États-Unis  |  2013

The Conjuring se sera imposé avant tout comme une expérience sensorielle d’une redoutable efficacité. Ne faisant guère de vagues de par la perspicacité de son discours ou la densité de la matière abordée, le film de James Wan nous aura néanmoins proposé l’une des incursions les plus marquantes de mémoire récente à l'intérieur de cette bonne vieille maison hantée. Tandis que les artisans du cinéma d’horreur continuent de chercher un nouvel eldorado quelque part entre les excès de violence, l’accumulation de scènes chocs et une vague de films de type « found footage » s’essoufflant à vue d’oeil, Wan aura orchestré son « chef-d’oeuvre » en remettant en question les mécaniques les plus éprouvées du genre pour finir par leur octroyer un sens et une efficacité complètement renouvelés. Le réalisateur aura révélé toute la puissance et la pertinence de ses méthodes à travers sa manipulation particulièrement ingénieuse de l’espace et du montage, déjouant continuellement les attentes du spectateur tout en le laissant appréhender le prochain moment d’effroi. En secouant tout aussi sournoisement les fondements de notre (in)crédulité face à la religion et au surnaturel, The Conjuring nous aura donné sans contredit la grande frousse de l’année 2013.

Texte : Jean-François Vandeuren




BERBERIAN SOUND STUDIO
Peter Strickland  |  Royaume-Uni  |  2012

Il n’y a pas eu depuis le Blow Out de De Palma un film aussi captivant sur la relation entre le son et le cinéma de genre que Berberian Sound Studio, huis clos atmosphérique lynchien et hypnotique, plus subtilement stylisé, mais aussi réflexif que son prédécesseur. Sans jamais quitter les pièces sombres de l’oppressant studio d’enregistrement, Strickland catapulte un bruiteur britannique (l’excellent Toby Jones) dans l’Italie délurée du giallo des années 70. Au-delà du simple hommage à ce singulier sous-genre du cinéma d’horreur italien, Berberian Sound Studio se révèle un véritable exploit de mise en scène d’espaces. Ce fétichisme de tout l’appareillage audiophile devient un personnage en soi et Strickland déconstruit tranquillement la psyché de son personnage à renfort de plans sensuels sur toute cette technologie quasi ésotérique de tactilité. Portant une attention particulière à toutes les sublimes réfractions de lumière causées par la projection traversant la cabine d’enregistrement qui verra passer maintes jeunes filles hurlantes, c’est à travers l’écran lui-même que Strickland achèvera son personnage. Dans l’une des séquences psychédéliques les plus réussies de l’année, le médium devient l’insidieuse arme tranchante; le projectionniste est d’ailleurs le seul personnage à porter l’iconique gant de cuir habituellement réservé au tueur de tout giallo qui se respecte.

Texte : Ariel Esteban Cayer




CAPTAIN PHILLIPS
Paul Greengrass  |  États-Unis  |  2013

Paul Greengrass sera revenu à la charge cette année avec une oeuvre alliant avec une force de frappe sidérante l’efficacité des méthodes privilégiées pour la réalisation de ces deux chapitres de la série Jason Bourne à la conscience sociale de Green Zone et United 93. Le plus bel accomplissement de Captain Phillips se situe en ce sens dans sa redéfinition des notions de héros et d’antagoniste, traitant chaque parti avec une sensibilité trop souvent évacuée de ce type d’initiatives lorsque mijotées à la sauce hollywoodienne. Le personnage titre domine ainsi l’écran de par sa force de caractère plutôt que ses muscles ou un quelconque arsenal, tandis que Greengrass parvient à exprimer à travers son groupe de pirates somaliens la situation des plus précaires d’une population africaine n’ayant plus le contrôle de sa destinée. Deux extrêmes défendus par un Tom Hanks au sommet de son art et un Barkhad Abdi d’un naturel confondant. Un voyage au bout de l’inévitable parfaitement soutenu par une tension à couper au couteau et cette manière aussi brute que d’une grande précision dont Greengrass filme et rythme l’action, menant à une ultime séquence d’opération militaire n’ayant rien à envier aux meilleurs élans en la matière des derniers Kathryn Bigelow.

Texte : Jean-François Vandeuren
 
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Article publié le 6 janvier 2014.
 

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