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UNBREAKABLE (2000)
M. Night Shyamalan

Par Jean-François Vandeuren

On se souviendra évidemment plus du film The Sixth Sense pour sa finale désormais célèbre que son récit qui était, jusqu’alors, tout de même intéressant, mais un peu bancal. L’effort révéla par contre plusieurs forces de l’écriture de M. Night Shyamalan, principalement au niveau du développement de ses personnages, ainsi que son désir de garder le spectateur dans le noir autant que possible, surtout avant la sortie d’un de ses films. Chose que très peu de studios d’Hollywood se risquent à faire de nos jours, préférant dévoiler toutes les grandes lignes de l’intrigue de leur nouvel investissement dans la bande-annonce. Mais avec la réussite commerciale de The Sixth Sense, Shyamalan venait de se faire un nom qui valait à lui seul son pesant d’or et ce dernier devait donc récidiver rapidement afin de battre le fer pendant qu’il était encore chaud. Le cinéaste répliqua donc à peine un an après un succès colossal avec un film qui, à défaut d’avoir accumulé les recettes escomptés aux guichets, aura tout de même révélé l’effort le plus accompli du cinéaste à ce jour grâce à tous les éléments narratifs gagnants du film précédent qu’il aura reproduit dans un contexte général de loin mieux maitrisé.

Il y a donc eu un déraillement de train et David Dunn (Bruce Willis) est non seulement l'unique survivant de cette tragédie, mais il n'a pas la moindre égratignure. C’est alors qu’Elijah Price (Samuel L. Jackson), le propriétaire d’une galerie d’art privilégiant la bande dessinée, lui suggérera une possibilité assez extraordinaire où David pourrait bien être une sorte de superhéros dans une hypothèse où les cases d’un comic book représenteraient une forme d’exagération de la réalité. Shyamalan y développe de ce fait une dimension mythologique et référentielle absolument saisissante où il aborde différentes notions de ce genre d’ouvrages, renvoyant particulièrement à Spider-Man dans la majorité des cas, quant aux responsabilités, à la préservation de l’anonymat, au costume, à la protection des proches du héros où ce dernier tentera de les tenir à distance et, bien sûr, à l’idée de contraire entre le personnage principal et son ennemi juré. Ce qui retiendra particulièrement l'attention dans ce cas-ci, c'est la retenue absolument stupéfiante avec laquelle chacun de ces éléments est présenté.

Et plutôt que de jouer la carte habituelle du genre favorisant celle d’un film d’action, Shyamalan reprend dans Unbreakable passablement la même esquisse dramatique que son film précédent, mais d’une façon beaucoup plus solide et inventive, même dans un cadre esthétique toujours aussi sobre. Le cinéaste se démarque ici particulièrement par son utilisation de l'espace dans le cadre, parvenant à y former diverses illusions de grandeur ou effets de claustrophobie, dépendamment des cas, par le biais de mouvements de caméra plutôt subtils et de la manière dont il dispose ses personnages dans le plan. Shyamalan utilise également un jeu de couleurs assez particulier en fin de parcours et qui différencie bien les codes cinématographiques et ceux de la bande dessinée en substituant les traditionnels habits noirs des brigands d'un film par les couleurs flamboyantes de ceux d'une planche à dessins, rendant ces derniers beaucoup plus visibles dans un univers généralement fade. Un autre approche fort ingénieuse du réalisateur dans le présent effort se retrouve au niveau des visions instinctives, voire le pouvoir spécial, de David Dunn qui nous montrent le passé malfaisant des individus avec qui il entre en contact par le touché, Shyamalan plaçant sa caméra à tout coup en contre-plongée, référant ainsi à un moniteur de surveillance, voire même une perspective divine.

Et comme pour The Sixth Sense, M. Night Shyamalan parvint à sortir Bruce Willis de son ensemble de rôles ordinairement plus énergiques pour lui confier les caractéristiques d’un personnage au tempérament beaucoup plus morne, un peu comme l’avait fait Terry Gilliam dans 12 Monkeys. Un changement qui fonctionne encore une fois très bien et qui rappelle sensiblement le même phénomène qui entoure Bill Murray depuis quelques années. Unbreakable forme donc un effort pratiquement sans faute que Shyamalan a su extrêmement bien modeler autour d’une mise en scène riche en détails qui s’affiche sous une sublime humilité visuelle. Un hommage fulgurant à la bande dessinée dont bon nombre des adaptations qui ont suivi auraient gagné à prendre comme exemple, le présent film surclassant d’ailleurs la plupart des essais qui découlèrent de la fameuse vague Marvel.




Version française : L'Indestructible
Scénario : M. Night Shyamalan
Distribution : Bruce Willis, Samuel L. Jackson, Robin Wright Penn, Spencer Treat Clark
Durée : 106 minutes
Origine : États-Unis

Publiée le : 20 Septembre 2005