A B C D E F G H I
J K L M N O P Q R
S T U V W X Y Z #
Liste complète



10 - Chef-d'oeuvre
09 - Remarquable
08 - Excellent
07 - Très bien
06 - Bon
05 - Moyen
04 - Faible
03 - Minable
02 - Intolérable
01 - Délicieusement mauvais



Cotes
Décennies
Réalisateurs
Le Cinéma québécois
La Collection Criterion



2005
2006
2007
2008
2009

SUR LE SEUIL (2003)
Éric Tessier

Par Louis-Jérôme Cloutier

Sur le seuil constitue un rare exploit du cinéma québécois. Pas nécessairement de par sa qualité, mais plutôt par le fait que les essais du genre sont rarement présent dans nos productions maisons. Le collectionneur, un peu dans la même catégorie, a lamentablement échoué à sa sortie. Le nouveau film d’Éric Tessier arrive-t-il à enfin apporter sur nos écrans un thriller d’horreur québécois réussi? Chose sure, il représente peut-être une étape cruciale du succès de notre marché cinématographique. Avec Les Invasions barbares et La Grande séduction, le Québec a réussi à compétitionner les blockbusters américains tout en s’ouvrant aux marchés étrangers. Il est également possible que Sur le seuil pourrait être repris ailleurs dépendamment de son succès. Tiré d’un roman de Patrick Sénécal, qui a écrit le scénario avec le réalisateur Éric Tessier, il constitue un bon film qui possède un potentiel plus grand que ce dont on en a tiré.

Le tout commence par une séquence d’introduction des plus ordinaires, mais débouche sur un générique d’ouverture inspirée de Se7en et baignant dans une musique techno-horreur laissant présager le meilleur. Thomas Roy est un célèbre auteur que l’on retrouve les doigts coupés au bord du suicide dans son appartement. Le psychiatre Paul Lacasse tente de percer son mystère jusqu’à ce qu’il s’aperçoive que l’Oeuvre de Roy est reliée à plusieurs actes sanguinaires ayant véritablement eu lieu au cours des années. Suite à ce départ prometteur, le film perd de son rythme assez rapidement pour tomber durant plusieurs minutes dans une série de conversations d’enquête un peu longues, redondantes et dont certaines sont superflues. Heureusement, la venue du journaliste vient mettre un peu de piquant et augmente le niveau de mystère. À partir de cet instant, le rythme qui manquait de constance depuis le début s’installe avec davantage de fermeté. La suite du récit développe un suspense des plus intéressants même s’il n’existe pas vraiment de retournements ou de surprise vraiment incroyable sauf dans les derniers instants. À ce chapitre, la bande-annonce en dévoilait défénitivement trop sur l’histoire. Quand même, le fantastique est exploité avec brio dans un mélange avec la réalité des plus satisfaisants. Le personnage de Michel Côté refuse avec réalisme, au départ, de croire à toute irrationalité. Il y a également une dualité religion contre science qui est un ajout très intéressant alors que l’un des personnages affirme lui-même que ni l’une ni l’autre des deux voies ne peut fournir la réponse cette fois-ci.

Cependant, la réalisation est plus qu’ordinaire et bien que certains plans soient intéressants, d’autres manquent d’imagination. Le style lui-même est beaucoup plus réussi avec des flashbacks bien dosés qui cadrent bien dans le récit tout en ayant une signification. Michel Côté offre une excellente interpretation dans la peau d’un personnage dépassé par les évènements et à bout de force. C’est ici que le titre prend tout son sens puisque Lacasse semble parfois frôler la détresse. Si Patrick Huard s’en tire bien, on ne peut en dire autant du look que l’on lui a donné. Disons que ce n’est pas une très bonne représentation d’un écrivain et comme le soulignait un autre critique, on se rapproche davantage du style d’une vedette rock. Jean L’Italien offre aussi une bonne composition dans son rôle d’un journaliste qui ne tombe pas trop dans les stéréotypes. La déception vient de Catherine Florent qui semble parfois figé sur son texte alors qu’elle devient à d’autres moments bien plus naturelle. En retournant au film lui-même, la dernière heure est sans doute la plus réussie avec une finale à en faire frissonner par son audace. Dommage que l’on n’ait pas arrêté le tout à cet instant et que les fameux mots «6 mois plus tard» soient apparus sur l’écran.

Sur le seuil est donc un film de solide qualité qui utilise avec efficacité les recettes éprouvées du genre. Sans avoir réinventé la roue, on offre un produit que l’on voit rarement dans le cinéma québécois. Il reste que le matériel en présence aurait sans aucun doute permis d’en tirer une meilleure production entre de meilleures mains. Cependant, considérant tous les récents échecs du genre aux États-Unis, on ne peut que féliciter Éric Tessier pour avoir réussi à faire franchir au cinéma québécois un nouveau seuil.




Version française : -
Scénario : Éric Tessier, Patrick Senécal (roman)
Distribution : Michel Côté, Patrick Huard, Jean-Pierre Bergeron, Nicolas Canuel
Durée : 99 minutes
Origine : Québec

Publiée le : 5 Octobre 2003