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SPIDER-MAN 3 (2007)
Sam Raimi

Par Jean-François Vandeuren

Le débat à savoir si Sam Raimi était réellement le cinéaste le plus qualifié pour amener les aventures de l’homme araignée au grand écran soulèvera assurément les passions pendant encore un bon moment. Issu du monde très volatil du série B, Raimi ne se gêna aucunement pour intégrer quelques acquis de son fameux Evil Dead à une signature visuelle que plusieurs estimèrent autrement trop gentille. D’un autre côté, c’est justement cette candeur qui permit au public de sympathiser aussi rapidement avec la cause de ce personnage en perpétuel conflit avec lui-même qu’incarne Tobey Maguire de façon désarmante depuis maintenant cinq ans. Parsemant sans aucune retenue ses élans de moments kitsch truffés de bonnes intentions et de bons sentiments, Raimi rendit justice à l’œuvre de Stan Lee et Steve Ditko en la ramenant à son essence originelle. Un curieux anachronisme que le cinéaste exécuta en tournant volontairement le dos à une approche plus sérieuse dont l’absence se fait particulièrement sentir dans ce troisième épisode que l’on disait plus sombre et complexe. Le cinéaste américain a d’ailleurs énormément de difficulté à durcir le ton alors que les rouages du présent effort le réclament constamment, donnant lieu à une production surchargée qui, un peu comme son héros, semble aux prises avec de sérieux problèmes de personnalité.

L’heure est donc aux règlements de compte dans ce troisième chapitre de l’une des franchises les plus lucratives de l’histoire du cinéma. D’une part, Harry Osborn prépare tranquillement sa vengeance contre Peter Parker qu’il croit toujours responsable de la mort de son père. Entre temps, notre tisseur de toile favori apprendra que le malfrat ayant tué son oncle serait toujours en vie et qu’il s’agirait en fait d’un criminel s’étant récemment évadé de prison répondant au nom de Flint Marko. Cherchant à fuir les autorités, ce dernier se retrouvera malgré lui au beau milieu d’une expérience scientifique qui mélangera les attributs du sable à l’ensemble des molécules de son corps. Comme si ce n’était pas suffisant, voilà qu’une étrange substance noire venue de l’espace se mêlera au costume de Spider-Man et amplifiera ses pouvoirs d’une manière qu’il n’aurait jamais osé imaginer. Le hic est que ce symbiote transformera progressivement ce dernier en un être égocentrique et imbu de lui-même qui prendra un malin plaisir à jouer les anti-héros et à mettre sens dessus dessous un univers personnel qui ne tenait déjà qu’à un fil.

La démesure est donc à l’honneur dans Spider-Man 3. La ligne de pensée de Raimi pour cet épisode fut vraisemblablement de traiter les amateurs aux petits oignons en leur donnant tout ce qu’ils désirent, quitte à réduire la cohésion de l’ensemble de façon drastique. Outre la surabondance d’ennemis auxquels l’homme araignée doit faire face, l’initiative se traduit également par une pléthore de références à divers moments clés de l’histoire de la bande dessinée, lesquelles jouent fort heureusement un rôle significatif au cœur de l’intrigue plutôt que d’interpeller que les fans invétérés du justicier sous la forme de simples amuse-gueules. Le problème par contre est que le cinéaste et ses co-scénaristes Ivan Raimi et Alvin Sargent ont tendance à privilégier la quantité au détriment de la qualité, à l’image d’un certain Brett Ratner et de son décevant X-Men : The Last Stand. Spider-Man 3 étire ainsi la sauce de manière confuse tout en cherchant continuellement son chemin dans une suite de sous-intrigues dont le fil conducteur brille par son absence. Mais contrairement à ce que nous aurions pu penser, ces faux pas ne sont pas le résultat d’une surcharge au niveau des antagonistes. En fait, le traitement de ces personnages jouant chacun un rôle déterminant dans toute cette histoire s’avère même l’un des aspects les plus réussis d’un scénario autrement désordonné au possible.

Le tout se gâte également lors de la rencontre entre l’adoration de Sam Raimi pour le Spider-Man des années 60 et le moment où ce dernier sera appelé à révéler son côté «obscur». D’une part, le fameux symbiote semblera amplifier beaucoup plus la stupidité que l’agressivité alors que pour marquer cet important changement de mentalité, Peter Parker se dotera d’une coupe de cheveux ma foi fort tendancieuse tout en flirtant de façon risible avec de nombreuses représentantes de la gente féminine. Même si ce comportement suit une certaine logique vue la nature première du protagoniste, celui-ci donne lieu malgré tout à une succession de séquences d’un ridicule consommé faisant paraître les scènes les plus moelleuses des deux premiers épisodes pour des moments de cinéma d’une finesse incomparable. Alors que Spider-Man 2 concentrait ses énergies beaucoup plus sur Peter Parker que son alter ego, Raimi aurait dû normalement réaliser l’inverse cette fois-ci en s’intéressant davantage à la nouvelle définition de justice de son (anti-)héros et à ses conséquences, ce à quoi le cinéaste ne consacre que trop peu de temps. Le présent effort marque tout de même quelques points de par la façon dont il aborde les relations qu’entretient Peter Parker avec les femmes, poursuivant une romance pour le moins houleuse pour laquelle nous serons poussés à espérer un dénouement heureux tout en la remettant sérieusement en question.

Sur le plan visuel, le faramineux budget mis à la disposition de Sam Raimi et de son équipe se fait évidemment sentir au niveau des effets spéciaux dont l’abondance n’a d’égal que leur splendeur esthétique, en particulier en ce qui a trait à la matérialisation des personnages de Sandman et de Venom. Pour sa part, le cinéaste américain poursuit sur sa lancée, mais en dosant toutefois ses élans d’une manière un peu plus chancelante entre les expoits de l’homme araignée et le quotidien de Peter Parker qu’il agrémente de nouveau d’une épaisse sauce fromagère. Ses plans aériens et ses mouvements de caméra pour le moins inusités commencent également à sentir un peu le réchauffé alors que Raimi répète sensiblement les mêmes stratagèmes mis sur pieds en 2002 et 2004 sans y ajouter quoique ce soit de nouveau. Le présent effort progresse ainsi de manière nonchalante avant de devoir conclure de façon précipitée sur une séquence tonitruante qui tente de mettre le point final à beaucoup plus d’enjeux que le film pouvait réellement en couvrir au départ. Pour une franchise dont la réputation repose sur la force narrative et la grandeur d’âme, ce troisième épisode forme en revanche un produit plutôt fade qui essaie énormément sans trop savoir ce qu’il fait.




Version française : Spider-Man 3
Scénario : Sam Raimi, Ivan Raimi, Alvin Sargent
Distribution : Tobey Maguire, Kirsten Dunst, James Franco, Thomas Haden Church
Durée : 140 minutes
Origine : États-Unis

Publiée le : 11 Mai 2007