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THE PUNISHER (2004)
Jonathan Hensleigh

Par Pierre-Louis Prégent

Depuis quelques années, les films de super héros à Hollywood connaissent un élan de popularité assez impressionnant. Tous ces personnages de comics américains obtiennent leur jour de gloire au grand écran. Que ce soit Spider-Man, X-Men, Hulk, Daredevil, Hellboy ou même Batman, dont le cinquième volet d’aventures se prépare actuellement, chacun de ces justiciers mutants ou musclés a droit à son épisode tourné en trente-cinq millimètres. Visant souvent un public relativement jeune, question que chaque enfant de l’Amérique demande à sa maman de lui acheter la boîte à lunch à l’effigie de son idole, ces films sont généralement abordés avec un ton caricatural et une certaine retenue dans leur violence. Par contre, constatant probablement le succès faramineux de tels films, on a décidé d’adapter la célèbre bande dessinée de Marvel où un homme vêtu d’un chandail orné d’une tête de mort stylisée venge sa famille, brutalement assassinée par de riches malfrats. Son nom : le Punisher...sa motivation : punir les méchants...ses pouvoirs et ses armes : deux Desert Eagle et pas mal n’importe quel objet avec lequel on peut massacrer quelqu’un. On est donc loin du justicier conventionnel, qui, ici, ressemble plutôt à un vengeur assoiffé de sang.

Comme prémisse, c’est intéressant. Un héros plus sombre, tant dans son univers et ses motivations que dans la violence qu’il emploie pour contrer ses ennemis, la mise en jeu de sentiments plus intenses, etc. permettaient une certaine liberté et promettaient une facture plus crue. Bref, on oublie la censure et le classement PG-13 que les grosses maisons de production s’assurent d’obtenir pour vendre plus de billets aux guichets. Même si, ne nous le cachons pas, le scénario est entièrement recyclé (pensons à The Crow, Faust : Love of The Damned, Spawn, etc.), la possibilité de faire un film obscur avec une touche caricaturalement violente et visuellement frappante était indéniablement présente. Ou, du moins, la chance de faire un divertissement réussi au scénario classique avec un penchant vers la bande dessinée semblait offerte sur un plateau d’argent.

Mais, malheureusement, l’échec est cuisant et ce, à tous les niveaux. Tout d’abord, au niveau du scénario, c’est redoutablement mal foutu. On commençait déjà avec une histoire qui sentait le surgelé et laissez-moi vous dire que plus les minutes s’écoulent et que le morceau dégèle, plus son arôme laisse dangereusement croire qu’il s’agit d’un gros navet. Par où commencer ? Il y a cette introduction ridicule qui, dès le départ, annonce de mauvais présages. Puis, on poursuit avec une présentation maladroite du protagoniste à travers des dialogues avec d’autres personnages tout à fait accessoires et inintéressants au développement désertique. Leur multiplicité est si aberrante et confondante qu’on en oublie quelques-uns, sans même en avoir le moindre doute. Même Howard Saint, l’abominable ennemi du Punisher, est si mal développé et si unidimensionnel qu’on n’y accorde aucune importance particulière. Le spectateur s’assoit donc devant l’écran et regarde le Punisher faire la peau de chaque homme que Saint lui envoie, jusqu’à l’affrontement final, où notre héros, armé jusqu’aux dents, ira au quartier général des vilains pour les fusiller par demi-douzaine. C’est en grande partie l’insipidité des personnages et des affrontements ridiculement épisodiques qui laisse une si mauvaise impression après le visionnement de The Punisher. De plus, malheureusement, ce n’est pas tout.

L’interprétation est également assez médiocre. Thomas Jane, dans le rôle-titre, laisse à désirer. Monolithique et plus présent physiquement (nous parlons de muscles, ici) que sentimentalement, Jane offre un Punisher trop gratuitement brutal et dépourvu de nuance. John Travolta, qui a déjà prouvé son aptitude à jouer les truands crapuleux dans Broken Arrow et Face/Off, n’est pas plus convaincant, interprétant sans aucun charisme un personnage radical et atrocement mal écrit. Les occupants des rôles secondaires font un boulot tout aussi terne. Particulièrement Ben Foster, dans le rôle d’un jeune junkie aux nombreux perçages et Rebecca Romjin-Stamos, dans le rôle d’une femme supposément fragile qui tombe amoureuse de son voisin justicier.

Si au moins on avait réussi à créer un produit visuellement intéressant, le tout n’aurait pas été complètement gâché. Mais tel n’est pas le cas. En effet, on se demande bien qui a pu envoyer Jonathan Hensleigh au gouvernail de ce film. La réalisation est d’une affligeante pauvreté. Les plans cinématographiquement intéressants se comptent sur les doigts d’une main, le montage est si boiteux qu’on a parfois de la difficulté à suivre les événements (et ce n’est pas à cause de leur complexité, je vous le dis !) et la photographie est on ne peut plus banale. Bref, Hensleigh est l’un de ces anonymes réalisateurs hollywoodiens qu’on recyclera probablement à la télé dans quelques années, alors que son lamentable échec aura été enterré sous une pile d'autres noms responsables de blockbusters ratés.

Somme toute, cette série d’affrontements, dont le dynamisme est ruiné par le risible montage et mal rendu par d’exécrables plans, ne remplit aucune fonction valable, pas même le divertissement. Avec un scénario que je qualifierais d’inadmissible, il est difficile de croire que des gens apprécieront réellement ce film d’action piteux aux personnages aussi dérisoires et creux que le scénario dont ils sont sortis. Un film aussi mal écrit, réalisé et interprété ne devrait jamais connaître l’éloge d’être projeté en salles…il existe un marché pour ce genre de déchet cinématographique ; le marché de la vidéo. Un conseil, n’allez pas voir ce film, ne serait-ce que pour éviter qu’une suite ne voit la lumière un jour...Évitons cela…Faisons en sorte que Hensleigh et sa bande d’incompétents ne pondent pas une suite. L’heure de la punition a sonné!




Version française : Le Punisher : Les liens du sang
Scénario : Michael France, Jonathan Hensleigh
Distribution : Thomas Jane, John Travolta, Rebecca Romijn-Stamos, Roy Scheider
Durée : 124 minutes
Origine : États-Unis

Publiée le : 27 Avril 2004