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MEETING PEOPLE IS EASY (1999)
Grant Gee

Par Alexandre Fontaine Rousseau

En 1997, OK Computer de Radiohead sort sur les tablettes des disquaires. Il deviendra l'album d'une décennie ainsi que celui d'une génération, le cri de détresse d'une société régie par les médias et par des moyens de communication de moins en moins humains. Couronné par la critique comme un chef-d'oeuvre absolu, le disque réussit à toucher le grand public malgré sa facture somme toute peu conventionnelle. C'est le triomphe pour le groupe d'Oxford. Pourtant, la tournée mondiale qui suivra sera un désastre pour le groupe. Démotivés et épuisés, les membres du groupe se désintéressent de leur musique et se sentent harcelés par la presse. La machine Radiohead tourne à vide. Lorsque le groupe retourne en studio pour tenter d'enregistrer des ébauches d'une suite à OK Computer, rien ne semble satisfaire les membres. Meeting People is Easy tente de raconter cette histoire, offrant par la même occasion une sorte de compagnon visuel à OK Computer qui explore les mêmes thèmes de l'isolation et de solitude inhérente au rythme de vie moderne. Cependant, le film de Grant Gee s'avère une déception qui intéressera uniquement les plus inconditionnels fanatiques de la formation britannique.

Le premier problème majeur de Meeting People is Easy est de ne pas assez se distancier de son sujet sans pour autant que cette proximité ne permette à Gee de véritablement rapprocher le spectateur du groupe. Sa caméra est fort souvent vide, son propos sur la superficialité des médias face à l'art annulé par la superficialité de ses propres images... On ressort de l'expérience sans mieux comprendre Radiohead ou la genèse d'OK Computer. On a toutefois eu la chance d'être exposé à une infinité d'images du groupe ne faisant pas grand chose, à des séquences lacérées de concerts et à quelques entrevues volontairement inaudibles. Tout au long du film, le groupe joue la comédie pour la caméra de Gee en exhibant une gamme complète de moues emmerdées sans jamais tenter de connecter autrement que par ce stratagème douteux avec son public.

À la limite, on pourrait ici affirmer que cette retenue est normale pour un groupe de musique qui peut tout naturellement décider d'exprimer ses idées par la seule entremise de ses compositions. Or, si tel est le cas, pourquoi faire un film? Et pourquoi y utiliser d'une façon si inconsistante la musique du groupe? Les meilleurs moments du film sont ceux où Grant Gee se concentre sur la musique de Radiohead, comme lors de la fascinante séance d'enregistrement de Big Boots qui ne mènera à rien de concret selon le groupe, ou lorsqu'il l'utilise vraiment pour alimenter son propos. Malheureusement, ces moments sont trop éloignés les uns des autres pour que le film puisse aspirer à atteindre un quelconque rythme de croisière. Quant à ce discours critique sur les médias que tente de développer Grant Gee, il ne lève qu'en de rares occasions. La fameuse séquence où le chanteur Thom Yorke est bombardé par les flashs de caméra alors qu'il prend différentes poses apathiques en demeure plus ou moins le point culminant. Cela dit, il s'applique au film du réalisateur qui finalement utilise à peu près la même approche que ceux auxquels il s'attaque.

À trop vouloir glorifier Radiohead, Grant Gee oublie d'offrir un film complet. Trop occupé à tenter de transformer le refus du groupe de jouer Creep en spectacle en une crise existentielle profonde, le réalisateur n'égratigne que la surface de cette idée, celle-là digne d'être explorée, que nous vivons dans une société froide où est cultivée l'apathie profonde et l'impression d'impuissance des individus. Quant à la facture visuelle du film, elle demeure relativement clichée mais malgré tout intéressante. Si OK Computer est un album incontournable qui aura marqué son époque et dont la place dans l'histoire de la musique est assurée, Meeting People is Easy est un film plutôt ordinaire qui intéressera les maniaques de Radiohead mais ennuiera fort probablement les autres qui le trouveront maniéré et un peu redondant. Le grand film à propos de Radiohead demeure encore à faire.




Version française : -
Scénario : -
Distribution : Thom Yorke, Jonny Greenwood, Colin Greenwood, Ed O'Brien, Phil Selway
Durée : 99 minutes
Origine : Angleterre

Publiée le : 15 Février 2005