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KUNG FU HUSTLE (2004)
Stephen Chow

Par Alexandre Fontaine Rousseau

Après le succès à retardement en sol américain de son Shaolin Soccer, la figure emblème du cinéma grand public chinois Stephen Chow revient à l'assaut des cinémas avec une autre comédie aussi absurde qu'insensée, genre mieux connu sous le nom de mo lei tau dans la langue de Mao. D'emblée, Kung Fu Hustle (Gong Fu en version originale) est à prendre comme un équivalent à Enter The Dragon dans la carrière de Chow. Car, comme l'était le dernier film tourné du vivant de Bruce Lee, cette nouvelle production au budget imposant est une tentative de gagner un public international aux péripéties frénétiques de cet énergique bouffon que l'on pourrait qualifier de croisement mutant entre la légendaire star du cinéma d'arts martiaux d'Hong Kong et l'entière distribution des Looney Tunes.

Ce qui veut dire, bien entendu, qu'il n'y a pas grand chose à prendre au sérieux dans ce Gong Fu aussi débile qu'il est impossible à épuiser. Que Chow donne dans la légèreté peu cérébrale n'implique cependant pas qu'il n'a pas évolué en tant que réalisateur depuis Shaolin Soccer, loin de là. Avec Gong Fu, son humour chaotique est canalisé avec plus d'aplomb en plus d'être servi par un sens esthétique beaucoup plus raffiné que de par le passé. Tout, ici, a gagné en taille et en précision. Peut-être est-ce en partie la présence du célèbre chorégraphe Yuen Wo Ping, responsable entre autre des combats de The Matrix et de Tigre et Dragon, qui explique cette évolution.

Mais on sent finalement que c'est Chow lui-même qui a plus d'ambition et d'inspiration qu'auparavant. Car l'histoire qu'il utilise ici comme prétexte à son spectacle tonitruant et vif, sorte d'hommage parodique aux films de yakuzas et d'arts martiaux qui ont nourri sa jeunesse, tient la route malgré les clichés, qu'il utilise ici à bon escient pour inscrire son film dans la longue tradition d'un genre n'ayant jamais fait dans la dentelle. Or, il est primordial d'accepter la vocation grand public du film pour l'apprécier pleinement. Gong Fu est un gros bol de pop-corn graisseux et copieusement salé qu'une épice exotique mystérieuse rend par magie surprenant.

Cette orgie d'effets spéciaux numériques hystériques profite donc pleinement de son ample budget pour en mettre plein la vue à grand coup de plans biscornus et de séquences de combat imaginatives et comiques. Ce qui, toutefois, frappe d'emblée le spectateur, c'est à quel point Chow est moderne dans son esthétique, se nourrissant clairement à même le rythme et l'allure du jeu vidéo tout en restant ancré dans l'univers du cinéma. Car, au contraire de ces atroces adaptations américaines de ludiciels qui pleuvent par les temps qui courent, la démarche folle de Chow demeure du ressort cinématographique. Les références à Kubrick, Keaton, Leone et au cinéma d'Hong Kong en sont la preuve.

En fin de compte, ce spectacle hyperactif et hyper-kinétique n'a rien de l'expérience philosophique enrichissante mais demeure un excellent divertissement à grand déploiement dont l'absurdité pleinement assumée place l'auteur dans la grande tradition d'Abrahams et Zucker. Cet engouement soudain du public nord-américain pour le cinéma oriental a tout d'une mode éphémère. Mais force est d'admettre que ce nouveau délire de Stephen Chow fait changement de ce que les États-Unis font de tapageur et de manipulateur par les temps qui courent. Le clown chinois récidive avec succès et livre son oeuvre la plus aboutie.




Version française : -
Version originale : Gong Fu
Scénario : Stephen Chow, Tsang Kan Cheong
Distribution : Stephen Chow, Wah Yuen, Qiu Yuen, Kwok Kuen Chan
Durée : 95 minutes
Origine : Chine

Publiée le : 29 Avril 2005