IZO (2004)
          Takashi Miike
          
          Par Alexandre Fontaine Rousseau
          
          Takashi Miike est l'un des pires réalisateurs reconnus de sa 
          génération. Son immaturité crasse est presque aussi 
          irritante que l'arrogance de sa rhétorique nihiliste d'apparat. 
          Pourtant, on lui porte attention de temps à autre dans un élan 
          de curiosité morbide. Peut-être a-t-il changé depuis 
          la dernière fois que nous avons eu de ses nouvelles? Comme de 
          raison, Miike ne change jamais. La spirale autodestructrice semblant 
          dicter son processus créatif le mène toujours plus profondément 
          dans les ténèbres de l'obscurantisme misérabiliste. 
          Takashi Miike propose la débilité comme mode de pensé. 
          Son cinéma sert à toutes les sauces le chapitre d'introduction 
          de La Philosophie pour les nuls, scandant des slogans indignes 
          d'un débat fumeux du CÉGEP à un rythme abrutissant.
          
          Son plus récent film - quoiqu'avec le productif Miike nous ne 
          soyons jamais sûr - Izo, affirme que le salut est un 
          mythe et que la douleur prouve l'existence en s'appuyant sur une argumentation 
          visuelle aussi ténue que sanglante. Avec Izo, le réalisateur 
          japonais s'enfonce plus profondément que jamais dans l'anarchisme 
          cinématographique bon marché. Son film se résume 
          à un interminable carnage ésotérique exempté 
          de la notion d'espace-temps grâce à un scénario 
          dont l'aberrante simplicité est voilée par d'inutiles 
          contorsions narratives. L'esthétique Miike se résume à 
          l'idée de complexifier la simplicité alors que sa thèse 
          défend que toutes les complexités ne sont que simplicité. 
          Le paradoxe sert-il à nourrir les débats vides entre ses 
          fans?
          
          Arrive-t-on à dénicher un fil conducteur à même 
          ce capharnaüm chaotique? Crucifié et embroché à 
          mort, une incarnation damnée de l'irrationnel erre sans but entre 
          les époques pour tuer tout ce qui bouge. Convaincu de l'absurdité 
          de la vie, il devient un vaisseau de la destruction absolue. Izo 
          est un immortel qui défie tous les dieux et toutes les figures 
          d'autorité dans sa démarche violente. Le film embrasse 
          l'athéisme de son héros en s'amusant à bafouer 
          divers symboles religieux en passant du bouddhisme à la chrétienté 
          sans faire de distinction. Malheureusement, son propos sur l'enfer sur 
          terre dans l'esprit humain ne dépasse pas l'ingéniosité 
          d'une mauvaise chanson punk.
          
          Au fond, Miike nous sert une fois de plus un exercice de style tapageur 
          et vide dont la présentation maniérée n'a même 
          pas le mérite d'être visuellement satisfaisante. Plus que 
          jamais, il calque ici la bande dessinée jusque dans ses moindres 
          tics. Izo est un gigantesque manga entrecoupé de montages 
          prétendument profonds, d'images d'archives et d'interminables 
          segments chantés. Mais cette débauche déjantée 
          n'arrive jamais à cacher l'incroyable vacuité du style 
          Miike.
          
          Rarement un réalisateur a-t-il combiné la stupidité 
          à l'état pur à une telle prétention. Nous 
          avons bel et bien affaire à du cinéma extrême. Mais 
          c'est une région de la création qui aurait sans doute 
          gagnée à ne pas être explorée. Dans Izo, 
          la violence est une fin en soi. C'est le message et le messager. Il 
          ne fait aucun doute que le réalisateur tente de présenter 
          le cycle éternel de destruction auquel semble attaché 
          l'humanité. Mais Miike ne se hisse jamais au rang de commentateur 
          et, comme il le faisait dans Visitor Q, se contente d'emballer 
          le tout en un spectacle tape-à-l'oeil vite digéré. 
          Vous pourrez inventer une profondeur à Izo. Mais les 
          seules profondeurs qui visite ici Miike sont celles de sa propre filmographie, 
          dans laquelle ce déchet fait office de nouveau fond du baril. 
          Izo, c'est la métaphysique de l'incompétence.
        
          
         
        
        
        Version française : -
        Scénario : 
Shigenori Takechi
        Distribution : 
Kazuya Nakayama, Kaori Momoi, Ryuhei Matsuda, Ryôsuke 
        Miki 
        Durée : 
128 minutes
        Origine : 
Japon
        
        Publiée le : 
4 Juin 2006