INTOLERABLE CRUELTY (2003)
Joel Coen

Par Louis-Jérôme Cloutier

Une chose essentielle doit être dite à propos de Intolerable Cruelty: il ne s’agit pas d’un film typique des frères Coen. Ils se sont chargés de la réalisation et ont apporté quelques retouches au scénario, mais pour l’essentiel, l’histoire n'est pas d’eux. Ce projet a en fait pris beaucoup de temps à germer, passant par divers réalisateurs. Il en résulta que ce film est le plus accessible de tous ceux faits par Joel et Ethan. Avantage ou inconvénient? Même si Intolerable Cruelty est un film respectable centré sur la très bonne performance de George Clooney, on ne peut qu’être déçu par l’ensemble du produit qui manque d’humour recherché et d’idées originales.

Ce film romantique un peu tordu nous présente l’avocat Milles Massey. Cet homme prospère qui ne perd jamais une cause tombe amoureux de la femme de l’un de ses clients. Celle-ci est en fait une arnaqueuse qui tente d’avoir une bonne part de la fortune de ses maris. Ce point de départ simpliste donne comme résultat un film léger qui tente d’être romantique et comique sans jamais vraiment réussir dans l’un ou l’autre des genres. L’ensemble a malheureusement déjà été exploité dans diverses productions. L’effort est quand même présent. Dans les mains d’autres réalisateurs, ce film aurait passé inaperçu. Certaines farces ne font même pas esquiver un sourire dont celle amenée par Cedric The Entertainer qui est pitoyable. Par contre, les personnages assez colorés et l’excellente performance de Clooney sauvent un peu le tout. Ce dernier est tout simplement charmant dans un rôle taillé à sa mesure. Zeta-Jones, pour sa part, piétine dans un personnage mal construit dont on arrive mal à saisir le caractère. La distribution a donc été mal choisie dans la moitié des cas. On remercie les Coen d’avoir confié le rôle principal à Clooney sans quoi l’intérêt envers Cruelty et sa qualité auraient descendus dangereusement bas.

Il reste plusieurs scènes amusantes impliquant Clooney et son partenaire plutôt sentimental. On ne se retrouve donc pas avec un produit totalement raté, mais dommage que l’on arrive mal à doser romantisme et comédie. À ce chapitre, certaines séquences plus sérieuses font soupirer. On aimerait bien retrouver Fargo ou The Big Lebowski à travers ce film. Malheureusement, les Coen ne s’investissent pas dans cette production comme dans un film qu’ils ont bâti eux-mêmes. On reconnait quand même certaines de leurs touches. Reste que leur travail est très sobre et dans les conventions. On ne peut leurs en vouloir puisque je répète que ce film n’est pas vraiment le leur. Le mieux à faire est de leurs reconnaitre de ne pas tomber dans la médiocrité dans un scénario écrit par le duo de Big Trouble. Il y a une certaine énergie et un rythme plutôt intéressant dans le film tout comme un bon développement des diverses situations. J’aurais tendance à croire que l’on a un peu trop retardé les péripéties et que la première partie du film tombe un peu en longueurs alors que le reste est beaucoup plus satisfaisant. En effet, la dernière demi-heure est bien plus haute en rebondissements et en humour de qualité.

En résumé, Intolerable Cruelty est tout ce que l’on ne veut pas voir les Coen faire dans leur futur, mais aussi le genre de comédie romantique que l’on souhaiterait voir plus souvent. George Clooney offre un de ces meilleurs rôles comiques avec un charme inouï. Dommage que ce ne soit pas toute la distribution qui offre d’aussi bonnes performances. Le scénario aurait dû être complètement revu au niveau des pivots et de la structure. On ressort un peu déçu de ce film quoique passablement diverti par le premier produit de consommation des frères. Tout de même supérieur à plusieurs produits similaires, mais à voir avec réserves et sans grandes attentes.