THE GREAT DICTATOR (1940)
          Charles Chaplin
          
          Par Louis-Jérôme Cloutier
          
          Dans les classiques du cinéma américain, Charles Chaplin 
          occupe une très grande place. Son génie est encore reconnu 
          de nos jours et avec le recul, ses œuvres gardent leur fraîcheur. 
          The Great Dictator est l’un de ses films les plus célèbres 
          avec Modern Times. Tout comme ce dernier, le film sert, avant 
          tout, à exprimer une critique sous des airs de comédie. 
          Réussir un tel exploit, surtout à cette époque, 
          tient du défi. Chaplin l’a relevé à la perfection.
          
          The Great Dictator suit en parallèle deux personnages 
          incarnés par Chaplin mais aux vies bien différentes. D'un 
          côté, il y a le dictateur Adenoid Hynkel qui dirige le 
          pays avec un gant de fer et de l’autre côté, il y 
          a le pauvre barbier juif vivant dans le ghetto. Évidemment, les 
          actions du dictateur influencent la vie du pauvre juif.
          
          The Great Dicatator se veut une comédie satirique qui 
          cherche à dénoncer la folie du nazisme, mais aussi de 
          l’homme en général. Au lieu de présenter 
          cette critique dans un cadre sérieux, Chaplin a préféré 
          faire un film humoristique dont Kubrick s’est certainement inspiré 
          pour Dr. Strangelove. Les événements relatés 
          pourraient servir à un film dramatique, mais on s’en sert 
          plutôt pour l’effet inverse. Le résultat tient du 
          chef-d'œuvre. Chaplin arrive à prévoir avec une précision 
          chirurgicale les dangers du nazisme. Il dirige également bien 
          sa critique face à l’absurdité des sociétés 
          dirigées par des hurluberlus décidant à eux seuls 
          de ce qui est bien ou non. Il faut noter que le personnage d'Adenoid 
          Hynkel est un parfait idiot qui a un grand ego de lui-même tout 
          en étant jaloux d’un autre dictateur. Chaplin nous dévoile 
          un Hitler qui se met les pieds dans les plats et qui est très 
          loin de pouvoir diriger un pays. Toutes les scènes mettant en 
          scène ce personnage sont absolument délicieuses surtout 
          pour ceux ayant des connaissances en histoire et qui peuvent interpréter 
          le message qui se cache derrière le tout. Même ceux qui 
          ne la connaissent pas forcément bien seront amusés par 
          les nombreux gags mis en scène. Il est à noter que ce 
          film est parlant, le premier de ce genre pour Chaplin. Par contre, on 
          sent encore l’influence du muet à plusieurs endroits. Le 
          visuel est très privilégié dans les situations 
          et les farces, tout comme la musique, viennent appuyer les actions des 
          personnages. Le tout donne un mélange savoureux des genres.
          
          Il y a tout de même des moments plus sérieux à travers 
          le film. Le plus important est le discours final de Chaplin. À 
          lui seul, il fait mériter au film le statut de chef-d'œuvre 
          et vient conclure avec brillance le message du film et montre directement 
          ce que Chaplin tente de faire comprendre. L’homme moderne n’est 
          plus un homme, c’est une machine qui obéit. Les sociétés 
          ne sont plus humaines mais mécaniques. C’est un peu ce 
          que l’on voyait dans Modern Times, mais The Great 
          Dictator est davantage d’actualité. On pense à 
          toutes les absurdités que l’on peut voir parfois en politique. 
          Comment un homme peut-il arriver à prendre le contrôle 
          total d’un peuple? Comment d’autres sociétés 
          peuvent-elles fermer les yeux sur les atrocités qu’il commet? 
          Chaplin tentait vraisemblablement de nous avertir dans son film. L’homme 
          en a-t-il retiré des leçons? Bref, c’est un peu 
          une leçon que l’on veut nous faire comprendre, mais ça 
          n’a rien de moralisateur. Je le répète, The 
          Great Dictator est un pur chef-d'œuvre. L’humour est 
          raffiné, subtil ou consiste seulement parfois en des gags visuels 
          rappelant le cinéma muet. Dans son double rôle, Chaplin 
          livre une performance incroyable comme toujours, mais c’est surtout 
          son incarnation du dictateur qui reste en tête. Ce personnage 
          est absolument mémorable et je vous dis à l’avance 
          que la réunion entre celui-ci et le dictateur de la Bactéria,Napaloni, 
          réserve des moments fort amusants où les deux hommes tentent 
          de se valoriser face à l’autre.
          
          Pour terminer, The Great Dictator mérite amplement de 
          faire partie des éléments clés du cinéma. 
          On ressent qu’il a été une source d’inspiration 
          pour d’autres œuvres. Malgré qu’il fut tourné 
          il y a déjà plus de 60 ans, le message reste actuel et 
          on ne peut qu’être ébloui par le monologue final 
          de Chaplin qui se veut un S.O.S afin de prévenir l’homme 
          de sa propre bêtise. Un monument qu’il faut absolument voir 
          et revoir. Purement génial.
         
          
        
        Version française : 
Le Dictateur
        Scénario : 
Charles Chaplin
        Distribution : 
Charles Chaplin, Jack Oakie, Reginald Gardiner, 
        Paulette Goddard
        Durée : 
124 minutes
        Origine : 
États-Unis
        
        Publiée le : 
19 Août 2003