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FEAR AND LOATHING IN LAS VEGAS (1998)
Terry Gilliam

Par Jean-François Vandeuren

Jamais un réalisateur n’aura eu autant de démêlés avec les grands studios d’Hollywood pour faire démarrer ses projets que Terry Gilliam. Histoire qui nous amène qu’à une seule et unique question se résumant en un seul mot : Pourquoi? Le réalisateur de Brazil nous a toujours habitué à des produits extrêmement inventifs au niveau du visuel en plus de savoir utiliser et de pousser son art aux limites pour réellement créer des univers psychédéliques extrêmement accrocheurs et très bien fignolés, se retrouvant la plupart du temps à rejoindre les rangs de véritables films cultes. Son dernier opus, Fear and Loathing in Las Vegas, ne fait pas exception à la règle. Une autre pièce de maître.

On se retrouve donc dans les années 1970 dans un univers de déchéances et de drogues en compagnie des personnages de Raoul Duke (Johnny Depp) et Dr. Gonzo (Benicio Del Toro), qui ne connaissent, sans aucun doute, la définition du mot sobre, dans un Las Vegas aux allures complètement éclatées et effrayantes.

Fear and Loathing in Las Vegas est un film qui a vraiment tout du film culte. On assiste à une débandade de dialogues mémorables et de situations vraiment tordantes traitées avec une réelle précision comme seul Gilliam aurait pu le faire. On a qu’à penser à des scènes comme celle où Duke et Gonzo se dirige sans aucune coordination sous l’effet de l’éther vers l’entrée d’un casino, ou lorsqu’un Duke, désorienté se réveille dans un appartement rempli d’eau utilisant un magnétophone collé à son ventre pour se remémorer des fractions de ce qui s’est produit la veille. Chaque scène vaut réellement sont pesant d’or. Le traitement entre la réalité et la métamorphose qu’elle prend sous l’effet des nombreuses substances illicites pris par les principaux protagonistes est présenté de façon tout à fait divine. Pourtant, la tâche était assez lourde. Il ne faut pas se le cacher, plusieurs cinéastes se sont souvent planter en tentant, ou plutôt, se risquant à reconstruire les effets de la drogues à l'aide d'une caméra. De son côté, Gilliam a su créer un résultat très convainquant en utilisant la perfection de son visuel. Faire bouger les motifs d’un tapis, transformer la clientèle d’un bar de Las Vegas en une véritable orgie de dinosaures ou en utilisant la morphologie au niveau des visages de l’entourage d’un très défoncé Raoul Duke nécessite un visuel soigné et à la fois dynamique pour le rendre crédible et efficace et il doit surtout, surtout, ne pas aller vers la formule du vidéo clip, ce que Gilliam réussi avec une précision chirurgicale. Fait à noter également, le film bénéficie d'une narration sans égale. La manipulation entre la narration et le dialogue est, à toutes fins pratiques, parfaite. Une scène vraiment incroyable par rapport à cet aspect est lorsque notre duo embarque un auto-stoppeur interprété par Tobey Maguire où un Duke devenu paranoïaque tente de voir dans le jeu du jeune homme qui vient tout juste de monter à l’intérieur de la voiture.

Concernant le jeu des acteurs, parmi une distribution impressionnante et convaincante, il faut souligner et resouligner la performance de Johnny Depp qui volent littéralement la vedette. Il nous offre ici fort probablement une des meilleurs performances d’acteur que j’ai eu l’occasion de voir de ma vie, tous films confondus. Il réussi à donner vie à son personnage avec une justesse remarquable sans jamais tomber dans la caricature. Pas étonnant venant, selon moi, de l’acteur le plus talentueux et accompli de sa génération. Cependant, si Depp excelle à l’écran, il est plus qu’évident, par contre, que la vraie vedette du film est sans aucun doute l’homme derrière la caméra. J'ai l'impression de me répéter, mais on assiste à un spectacle orchestré par un Terry Gilliam en très grande forme. Celui-ci nous offre des compositions de plans sans pareil, utilisant la juxtaposition d'éléments comme seul lui sait le faire. Le tout est accompagnés par une trame sonore que l'on désire aller se procurer à la minute où le film se termine.

Ce que nous offre Terry Gilliam avec son dernier film n’est rien d’autre qu’un incroyable "trip" d’acide. Ce dernier nous prouve encore une fois, après avoir marqué avec un nombre très restreint de réalisateur l’univers du cinéma américain des années 1990, qu’il appartient à une classe à part. Outre son incroyable talent de réalisateur, sa qualité la plus notable réside dans le fait qu’il sait comment manipuler par le visuel une histoire, aussi loufoque qu’elle puisse être, de façon à lui insuffler une âme, l’amenant à prendre forme, et vie. Un voyage psychédélique épatant. Une réussite totale.




Version française : Peur et dégoût à Las Vegas
Scénario : Terry Gilliam, Hunter S. Thompson (livre)
Distribution : Johnny Depp, Benicio Del Toro, Christina Ricci, Tobey Maguire
Durée : 118 minutes
Origine : États-Unis

Publiée le : 28 Juillet 2003