DIE HARD (1988) 
          John McTiernan 
           
          Par Alexandre Fontaine Rousseau 
           
          C'est la veille de Noël. De passage à Los Angeles pour renouer 
          avec sa femme et ses enfants, le policier new-yorkais John McLaine débarque 
          de l'avion sans savoir qu'il vient de se mettre les pieds dans les plats. 
          Son entrée en scène à la réception organisée 
          par la firme pour laquelle travaille sa femme correspond à quelques 
          minutes près à celle d'une bande de malfrats d'origine 
          germanique qui a tôt fait de prendre en otage tous les occupants 
          de l'édifice. Tous, sauf un. Résistant à l'envahisseur, 
          l'irréductible petit McLaine disparaît dans les étages 
          supérieurs de ce gigantesque gratte-ciel pour préparer 
          sa riposte. Bientôt, les vilains se mettent à disparaître 
          les uns après les autres et l'opération, un vulgaire vol 
          déguisé en opération terroriste, est mise en danger 
          par cette armée d'un homme qu'est devenu le vaillant McLaine. 
           
          Véritable plaque tournante dans l'évolution du cinéma 
          d'action américain pur et dur, Die Hard s'impose encore aujourd'hui 
          comme l'ultime référence des années 90 dans le 
          genre et ce même s'il fût tourné en 1988. Faisant 
          table rase des conventions ayant marqué la décennie du 
          cinéma de gros bras, le film de John McTiernan annonce l'avenir 
          du genre en établissant une nouvelle série de valeurs 
          esthétiques et morales se voulant plus réaliste que les 
          fantaisies militaristes de Rambo et de Commando. Die 
          Hard instaure l'archétype du nouveau héros d'action, 
          modèle dont le cinéma d'action actuel ne s'est pas encore 
          totalement affranchi, en donnant à Bruce Willis le rôle 
          d'un homme prétendument ordinaire pris dans une situation extraordinaire. 
          Die Hard sonne le glas de l'ère des super-héros 
          d'action; Stallone et Schwartzenegger peuvent retourner dans leurs gymnases 
          respectifs car la classe moyenne, elle, a trouvé un nouveau type 
          de héros qui lui ressemble d'avantage que ces colosses. 
           
          Ainsi, Die Hard réinvestie de tout son sens le principe 
          de l'identification, stratégie de base du cinéma hollywoodien. 
          Après des années passées en compagnie de super 
          agents formés par le gouvernement et d'Hercules à mitrailleuses, 
          le grand public - qui allait dès sa sortie accueillir le film 
          de McTiernan plus que chaleureusement - avait besoin de cette figure 
          plus modeste qu'incarne ici Bruce Willis. Sa fragilité, symbolisée 
          par son absence de souliers, s'avère en fait sa plus grande force 
          lorsque vient le temps de conquérir le public. Populiste, Die 
          Hard l'est jusque dans la nature de ses thèmes secondaires: 
          l'invasion de la vie privée par les média et la force 
          de la famille face à l'adversité. Cependant, le motif 
          principal du film demeure sa célébration systématique 
          du technicien, de l'ouvrier s'opposant à la maladresse dont font 
          preuve les bureaucrates en tous genres. Le FBI empire la situation tandis 
          que les policiers, hommes d'expérience qui connaissent le terrain, 
          rient dans leur barbe. Les vrais héros n'habitent pas dans les 
          tours de verre, un symbole du pouvoir que Die Hard fait d'ailleurs 
          sauter de toutes les manières possibles. 
           
          Néanmoins, le film de McTiernan demeure aujourd'hui encore d'une 
          efficacité remarquable non pas grâce à cette logique 
          trouée que les exploits surhumains de Willis viennent contredire 
          constamment mais plutôt parce que Die Hard s'avère 
          un produit techniquement impeccable. La direction photo soignée 
          est signée Jan de Bont, qui allait réaliser quelques années 
          plus tard le succès-monstre Speed en s'appliquant à 
          imiter de toutes les manières possibles la formule de tension 
          claustrophobe établie sur Die Hard. Précise et 
          réaliste, l'image vient appuyer le climat dur et froid de ce 
          film d'action coriace. La violence n'y est pas esthétique travaillée 
          mais plutôt percussion sauvage. Le scénario n'est pas en 
          reste, faisant preuve d'une certaine économie fort louable tout 
          en enchaînant les péripéties sans relâche. 
          Quand à Willis, il offre une performance dans le ton voulu face 
          à un Alan Rickman parfaitement détaché. 
           
          Film d'action musclé sans être risible, le premier Die 
          Hard allait avoir un impact irrémédiable sur les 
          valeurs et les recettes de ce type de cinéma dans les années 
          90. Certes, cette influence n'aura pas été particulièrement 
          positive - car après tout même la suite directe du film, 
          réalisée par Renny Harlin, est un navet de la pire espèce 
          - mais elle demeure malgré tout indéniable. Le gros cinéma 
          d'action sans aucune subtilité nous propose avec Die Hard 
          certains de ses meilleurs moments. Malgré sa fin horrible, digne 
          d'un message d'intérêt public payé par la NRA, au 
          cours de laquelle un policier vainc sa peur des armes à feu en 
          abattant au ralenti un malfrat sur fond de musique triomphante, le film 
          de John McTiernan s'affiche comme une mécanique particulièrement 
          bien huilée et assez originale pour l'époque dont l'assurance 
          technique est encore aujourd'hui admirable. Peu de films d'action de 
          la même période ont aussi bien vieillis, preuve que l'équipe 
          responsable de Die Hard était en pleine possession de 
          ses moyens. 
         
          
         
        
        
        Version française :  Piège de cristal
        Scénario :  Jeb Stuart, Steven E. de Souza, Roderick Thorp 
        (roman)
        Distribution :  Bruce Willis, Bonnie Bedelia, Alan Rickman, Reginald 
        VelJohnson
        Durée :  131 minutes
        Origine :  États-Unis
        
        Publiée le :  5 Août 2006
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