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LA DERNIÈRE INCARNATION (2005)
Demian Fuica

Par Alexandre Fontaine Rousseau

Il faut beaucoup de bonne volonté pour apprécier La Dernière incarnation de Demian Fuica. On a de toute évidence affaire à une modeste production québécoise mise en boite avec les moyens du bord pour satisfaire un public d'ici friand de cinéma fantastique de série-B, créneau bizarre et limité duquel l'industrie commerciale ne peut pas se permettre de tenir compte. On a donc de la bonne volonté à revendre lorsque débute cette histoire bigarrée de réincarnations multiples qui force un morne banquier (Gilbert Turp) à assumer ses responsabilités pour des gestes commis dans une autre vie. Voilà du moins ce que lui explique l'un des nombreux personnages du film dont le nom ferait décrocher la mâchoire de Bernard Pivot, une femme que le malchanceux banlieusard a vu sortir d'un oeuf lors de son dernier périple ornithologique (Catherine Florent).

C'est ainsi que, pour affronter un nain tatoué venu tout droit de Mésopotamie antique pour lui foutre une volée (Leonardo Fuica), notre héros somme toute peu vaillant devra prendre conscience des pouvoirs surnaturels dont il est le détenteur et apprendre à les maitriser avant un affrontement final dont l'enjeu sera sa vie. Notre capital de sympathie pour ce premier long-métrage du réalisateur Demian Fuica s'essouffle au fur et à mesure que progresse cette comédie fantastique par moments franchement maladroite où les acteurs sont encouragés à jouer aussi gros que possible. Quelque chose cloche dans toute cette histoire. Il manque à La Dernière incarnation cette touche d'inspiration unique qui en aurait fait plus qu'une tentative maison de créer un film culte dans le canon du cinéma fantastique.

De toute évidence, le film de Fuica aspire uniquement au statut de petite comédie sympathique et se consomme plutôt bien en tant que telle. Mais la ligne entre l'humour et le sérieux est parfois mal définie, le ton comique étant plutôt mal instauré en début de parcours pour ne transparaitre par la suite qu'en pointes saillantes incongrues mais amusantes. Ce n'est que dans le dernier tiers, de loin le segment le plus réussi du film, que le réalisateur et son équipe arrivent à créer une unité stylistique cohérente et satisfaisante. Mais si la mise en situation s'avère elle aussi plutôt bien menée, on sent un relâchement à mi-chemin lorsque les ingrédients de la recette commencent à s'accumuler sans réel sens narratif.

On comprend la difficulté de concocter de bons dialogues dans un tel maelström d'influences ésotériques mais la voie qu'emprunte à ce niveau Fuica, une sorte de sérieux caricatural combiné à une absurdité consommée, devient épuisante à la longue. Il y a une limite au nombre de fois que l'on peut entendre un personnage souligner sa lassitude exaspérée ou le ridicule de certaines situations sans perdre patience. On s'amuse davantage lorsque le film rit avec son univers plutôt que de rire de lui...

Sans être une franche réussite, La Dernière incarnation a le mérite de sortir du créneau auquel se confine habituellement le cinéma québécois et d'arriver à nous soutirer quelques rires bien sentis. On se demande toutefois si c'est par manque de moyens ou par manque d'imagination que le film n'arrive pas à convaincre totalement. N'en demeure pas moins que l'équipe entière semble s'être amusée à concocter ce petit film fort correct. À défaut d'être le genre de film que l'on recommande inconditionnellement, La Dernière incarnation demeure facile à appuyer et à apprécier. C'est toujours un plaisir de voir notre cinéma national se diriger ailleurs que vers le terroir pour dénicher son inspiration. On attendra le second film de Fuica avant de poser un jugement définitif sur le cas de ce jeune cinéaste. Pour l'instant, cette Dernière incarnation aux erreurs de jeunesse mal camouflées risque de trouver preneur auprès des amateurs du genre.




Version française : -
Scénario : Demian Fuica
Distribution : Gilbert Turp, Catherine Florent, Leonardo Fuica, Stéphane Demers
Durée : 90 minutes
Origine : Québec

Publiée le : 19 Août 2005