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THE DEAD ZONE (1983)
David Cronenberg

Par Alexandre Fontaine Rousseau

Les bonnes adaptations cinématographiques de romans de Stephen King sont aussi rares que les films intelligents mettant en vedette Pauly Shore. Mais si l'on se sert souvent du Shining de Kubrick pour prouver que certains produits filmiques ont transcendé le roman dont ils étaient tirés, la version de The Dead Zone livrée en 1983 par David Cronenberg est elle aussi loin d'être mauvaise. C'est que les prémisses simples de l'auteur fantastique américain permettent de traiter de questions morales classiques sans trop effectuer de détours narratifs abstraits. Prenons The Dead Zone, par exemple: Johnny (Christopher Walken) est victime d'un accident de la route et sombre dans le coma durant cinq ans. À son réveil, son ancienne copine est mariée à un autre et le professeur plutôt que de souffrir d'amnésie se découvre des facultés psychiques nouvelles qui lui permettent de revivre le passé, de déchiffrer le présent ou de prédire l'avenir. Mais lorsqu'il comprend qu'il possède aussi le pouvoir d'altérer le futur, celui-ci se demande s'il en a le droit.

Ce conflit éthique du personnage principal, Cronenberg s'assure de le livrer efficacement et sans jamais faire entrave au bon déroulement de ce qui est avant tout une aventure en terrain commercial, au contraire de son Videodrome paru la même année. Mais voilà que The Dead Zone prouve hors de tout doute la capacité du réalisateur canadien à livrer un film de commande solide et malgré tout marqué par sa griffe personnelle. En ce sens, il s'agit véritablement d'un accomplissement en son genre, d'un emploi intelligent de l'argent des gros studios pour produire un film d'auteur pour le grand public. Cronenberg arrive en fait à soutenir une tension progressive en fixant tout d'abord l'attention du spectateur sur l'évolution psychologique de Johnny plutôt que sur les évènements paranormaux qui l'entourent.

Certes, l'imagerie grotesque et étrangement organique qui caractérise les films les plus célèbres du réalisateur ne sont pas au rendez-vous. Mais Cronenberg arrive à fermement placer ce thriller surnaturel quelque peu convenu au sein d'une filmographie marquée par l'étrange. Il faut dire que la simplicité du traitement de Cronenberg est élégante, et qu'il arrive malgré les contraintes entourant la production à imposer un rythme particulier à son film. La mise en situation hautement efficace ne laisse pas deviner le rythme posé du développement de l'intrigue, alors que la hausse subite de pression lors du dénouement laisse pantois.

De plus, le réalisateur accomplit ici le double exploit de nous faire ressentir le poids de son élément surnaturel central tout en se gardant bien de trop forcer son effet. Nous acceptons sans problème la condition de Johnny comme étant réelle car l'exploitation qui en est faite est réaliste. Dès lors, nous sommes libres de nous pencher sur cette question franchement rhétorique que pose le film, ou de nous laisser tout simplement emporter par un scénario bien dosé et construit intelligemment.

Cronenberg livre donc avec The Dead Zone un film volontairement froid et clinique que vient appuyer le jeu juste et détaché de Walken. Mais le réalisateur y tire aussi plusieurs bonnes leçons qui le serviront dans ses films subséquents, notamment en délaissant la recherche constante de l'effet de choc pour cultiver l'inconfort subtil de l'imprévisible. Encore une fois, les mordus de King restèrent sceptiques à la sortie d'une bonne adaptation de l'une des histoires du célèbre romancier, brandissant l'argument médiocre de l'infidélité à l'oeuvre originale. Mais les cinéphiles reconnaitront le talent de Cronenberg qui a su transformer une intrigue somme toute ordinaire en un film prenant et mémorable, à prendre comme un exemple de retenu et de modération dans un genre souvent synonyme d'excès.




Version française : -
Scénario : Jeffrey Boam, Stephen King (roman)
Distribution : Christopher Walken, Brooke Adams, Tom Skerritt, Herbert Lom
Durée : 103 minutes
Origine : États-Unis

Publiée le : 15 Mai 2005