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THUNDERBALL (1965)
Terence Young

Par Alexandre Fontaine Rousseau

En 1965, l'engouement populaire pour la franchise 007 avait atteint son paroxysme: le gigantesque succès en salle de Goldfinger ainsi que la résurrection commerciale des deux premiers volets de la série, présentés aux États-Unis sous forme de programme double, témoignaient d'un enthousiasme soutenu de la part du public qui enhardira les producteurs Saltzman et Broccoli. Son statut d'icône culturel des années 60 déjà confirmé, l'agent secret James Bond faisait maintenant face à une pression auquel l'entraînement des services secrets ne l'avait pas préparé, soit les attentes de son fan club. Alors que From Russia With Love et Goldfinger témoignaient d'une certaine retenue en terme de déploiement, Thunderball s'avère ainsi le fruit calculé d'une offensive tout azimut sur les sens du spectateur. De retour aux commandes suite au passage remarqué de Guy Hamilton, le Britannique Terence Young lance sans retenue la saga sur la voie de la démesure: «Look up, look down, look out, here comes the biggest Bond of all!», affirmera avec une certitude tout à fait justifiée le slogan publicitaire de ce quatrième volet des aventures du célèbre espion. De nouvelles technologies sont développées pour satisfaire aux exigences de l'ambitieux tournage, tandis que la caméra Panavision est employée pour la toute première fois dans l'histoire de la série. Thunderball n'a pas l'intention de décevoir.

Côté intrigue, on mise sur quelques bonnes vieilles valeurs sûres: lorsqu'une crapule cruellement peu subtile du nom d'Emilio Largo - le genre de collectionneur de requins déguisé en pirate qui ne peut être qu'un puissant terroriste international - subtilise pour le compte du SPECTRE quelques ogives nucléaires, c'est à l'indomptable Bond que revient la tâche de récupérer le matériel militaire manquant. Conjuguant l'utile à l'agréable, le dévoué serviteur de sa majesté s'envole donc vers Nassau, la destination vacance favorite de tous les multimillionnaires du globe, afin de mener l'enquête. S'infiltrant dans l'entourage de Largo en prenant bien soin de lui subtiliser au passage quelques milliers de dollars aux cartes, Bond devra surtout convaincre la belle Domino de la malhonnêteté de son perfide amant. Ce qui, à son grand déplaisir, l'obligera à user de son don de séduction inné.

Si ses nouveaux adversaires sont plus sadiques que leurs prédécesseurs, Sean Connery s'avère quant à lui plus à l'aise que jamais dans son rôle. Multipliant les conquêtes avec un amusement palpable, ce 007 tout à fait conscient du mythe qu'il érige a non seulement droit à l'arsenal de gadgets le plus farfelu de sa carrière mais aussi à l'unes des plus généreuses panoplies de femmes qui ait été mise à sa disposition. Alors que la plantureuse actrice italienne Luciana Paluzzi impose sans peine ses charmes dans le rôle de la vilaine Fiona Volpe, c'est à la Miss France de 1958 Claudine Auger que sera confié le rôle de Domino; elle devancera ainsi une foule d'actrices célèbres, dont Julie Christie, Raquel Welch et Faye Dunaway, qui convoitaient le rôle. Voilà sans doute l'unes des raisons pour lesquelles l'acteur écossais affirme qu'il s'agit de sa prestation favorite en tant que Bond.

Désormais parfaitement définie, la formule gagnante de la série est ici appliquée à la lettre: Q équipe Bond, la légendaire Aston Martin DB5 est de retour et les multiples séquences d'action sont tempérées par quelques confrontations mondaines où l'espion étale son sens de l'humour et sa culture avec une vanité bien dosée. Malheureusement, le scénario de Thunderball multiplie les coïncidences louches et les invraisemblances plutôt mal camouflées: une fusée dorsale accompagnée du casque de sécurité assorti attend patiemment 007 dans le manoir de l'un de ses adversaires, alors que c'est tout à fait par hasard qu'un séjour dans un centre de détente le lance sur la piste de Largo. Ces raccourcis narratifs sont certes monnaie courante dans l'univers de James Bond, mais demeurent notables et quelque peu problématiques dans le sillage des plus méticuleux From Russia With Love et Goldfinger.

Point de transition pour la vénérable série, le dernier film mis en scène par Young annonce donc le début d'une période plus spectaculaire où les nuances narratives sont abandonnées au profit de la technique et des effets spéciaux. Les complexes séquences aquatiques de Thunderball seront tournées à l'aide d'une caméra spéciale qui vaudra d'ailleurs à John Stears un Oscar. Si certaines images sous-marines sont d'une beauté plastique remarquable, le film a par ailleurs moins bien vieilli que ses prédécesseurs justement parce que certains effets visuels sont aujourd'hui complètement dépassés: la finale à bord du Disco Volante de Largo frôle carrément le ridicule. Mais, malgré ces défauts mineurs, Thunderball demeure un divertissement tout à fait accompli en son genre. Le charisme de Connery demeurant imperméable au passage du temps, cette quatrième aventure du plus primitif et violent des héros de la Guerre froide s'écoute sans peine et ce même si certaines scènes s'étirent inutilement. Peu importe, d'ailleurs, puisqu'un public conquis d'avance allait faire fi de ces questions pour réserver au film un accueil dithyrambique. Couronnant la frénésie Bond des années 60 d'un succès fulgurant au box-office, Thunderball demeure toutes proportions gardées l'apex de la domination de la culture populaire par l'agent 007.




Version française : Opération Tonnerre
Scénario : Richard Maibaum, John Hopkins
Distribution : Sean Connery, Claudine Auger, Adolfo Celi, Luciana Paluzzi
Durée : 130 minutes
Origine : Royaume-Uni

Publiée le : 5 Janvier 2007