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THE VILLAGE (2004)
M. Night Shyamalan

Par Louis-Jérôme Cloutier

M. Night Shyamalan est un manipulateur, c’est ce que l’on peut affirmer après avoir visionné The Village. Plutôt, devrait-on préciser que les bandes-annonces étaient manipulatrices. Très clairement, le battage publicitaire porte à croire que l’on a affaire avec un film d’horreur qui posséderait un punch choquant. The Village est un drame que Shyamalan tente de faire passer pour un suspense d’horreur. Pensez à un drame de votre choix, un film tout à fait sérieux. Maintenant, imaginez que le scénariste y ait inséré de fausses pistes afin de tromper le spectateur, tout à fait gratuitement et inutilement.

Comme la plupart le savent déjà, il n’y a aucune créature. Et comme d'autres le croyaient, les habitants vivent à l’écart du monde moderne. Ceci constitue le «punch» principal, tout comme lorsque le personnage de Bruce Willis apprend qu’il est mort dans The Sixth Sense. Bien entendu, on n’y retrouve pas vraiment la même surprise étonnante et inattendue, mais plutôt un certain amusement devant une telle facilité un peu bête et trop invraisamblale pour être prise totalement au sérieux. Pour ce qui est des créatures, Shyamalan se garde de cacher par tous les moyens la vérité, mais il devient vraiment agaçant lorsqu’il revient à la charge en essayant de nous surprendre quand même, en laissant douter de l’existence des créatures une deuxième fois. À force de vouloir faire des coups de théâtre, Shymalan se parodie lui-même. Sous de grands airs, The Village ne cache donc que peut de chose. Il existe bien un deuxième degré au film, une sorte de propos social qui constitue le véritable thème du film. Les habitants ont fui la civilisation pour fuir la violence qui y règne, ce sont des gens dont un proche parent a été tué et qui ne veulent plus jamais connaitre la société moderne. Seulement, le propos est tellement réducteur qu’il ne possède qu’un faible intérêt. En plus, contrairement à Signs, le thème principal ne progresse pas grâce aux thèmes sous-jacents, mais en marge de celui-ci. Les créatures de The Village ne sont qu’un accessoire comme un autre au cœur du récit. Dommage que le film ne se concentre pas davantage sur le thème du culte de la peur, thème ayant une portée philosophique plus grande.

Quand même, Shyamalan offre encore une mise en scène inspirée et il dirige ses acteurs avec talent. D’ailleurs, la plus grande qualité du film réside dans la magnifique distribution avec Bryce Howard en tête qui devient une belle révélation grâce à la qualité de son jeu dans la peau du véritable personnage principal du film. William Hurt, Adrien Brody, Sigourney Weaver, Brendan Gleeson et Joaquin Phoenix viennent ajouter leur talent et permettent à The Village de rattraper une partie de ses défauts. En fait, aucun autre film de Shyamalan n’a possédé une palette d’acteurs de cette qualité. Dommage que ce dernier est en manque de réelle inspiration dans la partie scénaristique du film. Car s’il a encore trouvé une prémise intrigante, le film lui-même manque cruellement de nouvelles idées, de surprises et de suspense. Shyamalan était entre deux vagues, entre deux volontés, celle d’offrir un drame avec un propos social, ou celle d’offrir un autre suspense d’horreur de la trempe de The Sixth Sense. Il n’aurait pas dû choisir les deux avenues en même temps et espérer s’en tirer indemne. Le film aurait été nettement plus réussi si Shyamalan avait utilisé la même logique derrière Signs, les créatures auraient dû provoquer la progression du thème principal et non être de simples pantins dans celle-ci. Comme pour les protagonistes de son histoire, Shyamalan a voulu franchir des limites, mal lui en pris.

En conclusion, The Village est la première réelle déception provenant de Shyamalan, un premier pas en arrière. L’intrigue ne réserve pas de rebondissement spectaculaire, le film navigue maladroitement entre deux vagues et Shyamalan manipule le spectateur de façon plutôt simpliste, à l’image de son récit. Tout de même, The Village réserve quelques séquences et tournures intéressantes et la distribution est tout simplement excellente. Pris séparément, le film possède plusieurs qualités, mais rassemblées bout à bout, il devient nettement bâclé. Il devient trop facile, trop prévisible et trop ordinaire, et donc nécessairement décevant vis-à-vis les attentes. Shyamalan devrait définitivement s’orienter vers autre chose, son moule commence à être surexploité.




Version française : Le Village
Scénario : M. Night Shyamalan
Distribution : Joaquin Phoenix, Adrien Brody, William Hurt, Sigourney Weaver
Durée : 108 minutes
Origine : États-Unis

Publiée le : 2 Août 2004