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TEENAGE MUTANT NINJA TURTLES (1990)
Steve Barron

Par Jean-François Vandeuren

En soi, la série animée Teenage Mutant Ninja Turtles est un produit typique de la culture populaire enfantine de la fin des années 80 et du début des années 90. Les aventures des quatre tortues les plus célèbres de l’histoire formaient alors l’initiateur parfait à la culture de gros bras véhiculée par le cinéma d’action hollywoodien à une époque où se déchaînaient les Norris, Schwarzenegger, Stallone et, parfois même, les Van Damme. La consécration d’une telle série donnait lieu à un long-métrage. Pour les cas les plus populaires, Hollywood n’hésitait pas à passer de la planche à dessins à la réalité des plateaux de tournage pour ensuite inonder les magasins de jouets de produits dérivés de toute sorte. Mais comme pour la plupart de ces productions aux objectifs purement mercantiles, les producteurs du présent effort savaient que leur temps était compté. En ce sens, il est difficilement envisageable que ce premier Teenage Mutant Ninja Turtles réussissent à s’imposer auprès de la jeunesse d’aujourd’hui. Pourtant, cela ne veut pas dire que le film de Steve Barron a mal vieilli pour autant.

D’une part, nous ne pouvons rien reprocher à l’allure de nos quatre vaillantes tortues et de leur vénérable maître Splinter. Les artisans des studios Jim Henson effectuèrent un travail tout simplement colossal à ce niveau et parvinrent à introduire ces derniers dans la dynamique du monde réel sans complètement sacrifier leurs traits fortement exagérées associables aux dessins animés. Le résultat n’a d’ailleurs aucunement pris le coup de vieux qui aurait pu lui être fatal. Le tout est également appuyé par l’étonnante réalisation de Steve Barron qui s’avère particulièrement sombre pour un film visant un public dont la moyenne d’âge dépasse à peine les deux chiffres. Le réalisateur américain propose ainsi une facture visuelle sachant prendre certains risques le temps venu et dont l’agilité de bon nombre de mouvements de caméra n’a rien à voir avec la simplicité statique de la majorité des films du genre. Malheureusement, l’effort n’échappe pas à certains problèmes de transition entre les deux médiums. Si Barron se tire bien d’affaire dans la plupart des cas, le travail d’épuration semble malgré tout n’avoir été fait qu’à moitié, laissant alors le spectateur aux prises avec certains éléments qui passent difficilement dans un contexte réel, même pour un film de ce genre. Chose qu’aura parfaitement compris Bryan Singer dix ans plus tard alors que son adaptation de la bande dessinée X-Men aura justement été célébrée pour sa sobriété.

Pour leur part, les scénaristes Bobby Herbeck et Todd W. Langen tentent de nous faire avaler sans compromis la bonne vieille morale sur l’importance de la famille. Le film traite d’ailleurs la marginalité sous un angle assez inusité. Ainsi, dans un univers où tous les adolescents semblent avoir été corrompus par le crime et la vie de débauche, les plus marginaux d’entre eux, déjà fortement identifiés par leur carapace respective et leur teint vert, sont ceux qui obéissent aveuglément à la sagesse de leur figure paternelle. Il s’en suit alors une lutte sans merci entre la sphère familiale et les influences du monde extérieur devant déterminer qui servira de modèle à cette jeunesse égarée. Une bataille dont l’issue ne pourra avoir lieu que lors de la chute d’un des deux partis. Un point qui n’est évidemment pas sans rappeler le légendaire affrontement entre les deux côtés de la force dans Star Wars. Le casque de ce bon vieux Shredder épouse d’ailleurs étrangement les courbes de celui de Darth Vader, substituant toutefois le noir du costume mythique de ce dernier pour un rouge orangé scintillant des plus douteux. De plus, l’ennemi juré des quatre tortues n’hésitera pas à lancer le fameux « I am your father » à cette génération qu’il cherche désespérément à attirer du « côté obscur. »

Nous devons évidemment prendre en considération qu’il s’agit ici d’une production destinée à un public assez jeune. De ce point de vue, Teenage Mutant Ninja Turtles tint ses promesses et Barron ne se limita jamais à une approche trop délicate ou simplement anonyme. Le problème est que même si le présent effort est tributaire des valeurs d’unité familiale que le cinéma américain véhicule depuis ses débuts, le scénario de Herbeck et Langen affiche ses intentions sur un ton foncièrement manipulateur, ne se gênant pas non plus pour user d’une certaine forme de psychologie inversée pour convaincre son public cible. Évidemment, un tel effort ne s’adresse plus désormais qu’aux vieux nostalgiques désireux de revisiter certains films marquants de leur enfance à leurs risques et périls. Si la mise en scène de Steve Barron a su résister au passage du temps, la substance de l’opus, quant à elle, n’a définitivement plus le même attrait qu’autrefois. Malgré tout, il faut tout de même reconnaître qu'en terme de qualité, Teenage Mutant Ninja Turtles demeure encore aujourd’hui bien au dessus de la moyenne de ce type de projet.




Version française : Les Tortues ninjas
Scénario : Todd W. Langen, Bobby Herbeck
Distribution : Judith Hoag, Elias Koteas, Josh Pais, Raymond Serra
Durée : 93 minutes
Origine : États-Unis

Publiée le : 21 Septembre 2006