RUN LOLA RUN (1998)
Tom Tykwer

Par Frédéric Rochefort-Allie

Run Lola Run, voilà un titre accrocheur. Lorsque le film fut présenté en 1998, il séduisit un bon nombre de galas, sauf évidemment les Oscars. De toute façon, le réalisateur Tom Tykwer ne devait probablement pas s'attendre à y être invité si on se souvient qu'avec Winter Sleepers il avait été carrément oublié par les festivaux américains comme plusieurs autres cinéastes européens. Le destin dut donc unir Franka Potente, une jeune actrice à ses débuts et Tom Tykwer autant en vie commune que sur le plateau de Lola Rennt, leur bébé.

Dans ce film, notre héroïne Lola doit trouver 100 000 marks en 20 minutes pour sauver la vie de son amoureux Manni. Pourquoi? Celui-ci devait s'occuper d'une importante affaire, un test qu'un chef de gang lui faisait passer et malheureusement il n'a pas été à la hauteur. Manni a oublié le sac d'argent qu'il devait remettre à son chef dans un wagon de métro et un clochard s'en est approprié. Le problème est que 100 000 marks c'est une somme plutôt imposante et sans moyen de transport, Lola n'a d'autre choix que de courir.

Avec un tel titre, tout le monde s'attend à un film rythmé et c'est exactement ce qu'offre l'oeuvre de Tykwer, allant jusqu'à énergiser le spectateur. En plus d'avoir une structure diablement originale, Run Lola Run soutient son rythme tout au long de ses 80 minutes. La course effrénée ne semble durer qu'une vingtaine de minutes. Mission accomplie pour le réalisateur et au niveau du montage également faisant oublier les imperfections du film par la vitesse à laquelle la protagoniste doit faire face aux évènements. Car malheureusement, on ne peut qu'être déçu des nombreux problèmes de continuité, de la visibilité des projectiles qui font briser le verre et de la spécularité d'un pare-brise qui nous fait découvrir l'équipe de tournage. Mais on excusera le réalisateur qui disposait d'un budget assez chiche et qui s'en tire admirablement bien en nous offrant un film original qui ose prendre une structure peu commune tout en présentant des images très intéressantes au niveau de la composition. Mais Tom Tykwer a plus d'un talent car la musique techno qu'il a composé lui-même s'harmonise bien avec la nervosité de la course.

Les cinéphiles reconnaîtront les acteurs principaux, qui dans le cas présent sont Franka Potente (The Bourne Identity) et Moritz Bleibtreu (Das Experiment). C'est avec ce film qu'ils ont fait leurs preuves. Depuis ce temps, ils s'attaquent à la grosse machine hollywoodienne. Ce qui est génial, c'est qu'autant les deux acteurs principaux sont excellents lorsqu'ils sont seuls, autant en couple ils crèvent littéralement l'écran par leur jeu et leur charisme corrosif. Les acteurs secondaires sont aussi très attachants, même ceux qui n'apparaissent que quelques secondes.

Tom Tykwer s'inscrit donc avec cette oeuvre parmi les cinéastes les plus intéressants du cinéma contemporain. Malgré la déception que provoqua The Princess & The Warrior chez les fans du cinéaste, on peut qu'être intrigué par ce qu'offre Heaven, son nouveau long-métrage. Si vous êtes intéressés par le cinéma européen moderne où que vous en avez ras le bol des films qui semblent tous construits sous le même moule, Run Lola Run s'avère être un excellent choix. Gageons qu'une fois que vous l'aurez savouré, vous recommencerez l'expérience.