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OFFSIDE (2006)
Jafar Panahi

Par Jean-François Vandeuren

Même si son développement est des plus ambigus, le cinéma iranien connaît malgré tout un succès international fort enviable en ce moment. Aux prises avec un système de censure particulièrement rigide, les cinéastes iraniens doivent continuellement trouver de nouvelles façons de véhiculer leurs discours tout en contournant cette liste de contraintes des plus limitatives. Bizarrement acclamé pour sa simplicité, le cinéma iranien devient ainsi politique justement car il doit s’en dissocier autant que possible. Une obligation qui laisse évidemment certaines traces que l’on ne peut pas toujours ignorer.

Jafar Panahi est l’une des figures les plus importantes de cette « nouvelle vague iranienne ». C’est à lui que l’on doit les réputés The White Balloon, The Circle et Crimson Gold. Le réalisateur s’intéresse une fois de plus à la vie des femmes dans la société iranienne. Ce dernier s’inspire cette fois-ci des événements ayant entourés la qualification de son pays à la Coupe du monde de soccer de 1998. Panahi plonge ainsi ses différents personnages dans une situation où l’histoire est sur le point de se répéter. Alors que le match de qualification est en cours, plusieurs jeunes Iraniennes déguisées en homme tentent de se frayer un chemin jusqu’à l’intérieur du stade, un lieu qui leur est interdit. Bon nombre d’entre-elles se feront toutefois arrêter et l’armée les tiendra prisonnières en bordure du stade. Celles-ci chercheront après coup à faire valoir leur point auprès des soldats assignés à leur surveillance et de les convaincre de les laisser regarder la partie.

Sans inciter à la révolution, le film de Jafar Panahi questionne tout de même la validité en 2006 de ce type de restrictions imposées aux femmes de son pays. Pour un public extérieur, il s’agit évidemment d’un choc culturel qui, même si bien connu, se veut tout de même marquant et le positionnement face à ce dernier peut alors devenir ardu. Un point que Jafar Panahi prend fort heureusement le temps de souligner à l’intérieur de son récit. Cependant, la position de ses personnages masculins dans toute cette histoire demeure des plus ambigus et ne semble servir qu’à camoufler les objectifs réels de ce film partant encore une fois d’un fait fort simple pour finir par exposer une réalité sociale aux issues beaucoup plus complexes. Panahi s’affère d’une part à séparer ceux-ci d’un point de vue générationnelle tout en sous-entendant que la majorité des hommes de son pays seraient favorable à cette vague de changements qui tarde à se produire. Le cinéaste se montre ainsi optimiste face à la nouvelle génération, mais ne parvient pas à pousser le débat plus loin. Le problème également est qu’il finit trop souvent par ramener tout le monde à la case départ en imageant de manière un peu trop formelle la place qu’occupe l’état et les valeurs traditionnelles dans la vie de ces individus.

Visuellement, Jafar Panahi signe une réalisation plutôt simplette exécutée avec un minimum de moyens. Néanmoins, quelques points au niveau de l’exécution méritent d’être souligner. Si la mise en scène de Panahi demeure élémentaire sur le plan esthétique, celle-ci impose malgré tout un traitement particulièrement judicieux du temps du récit. Le match de soccer autour duquel tourne Offside durant 93 minutes, c’est précisément sur cette période de temps que s’échelonne l’entièreté du film. L’effort de Panahi se démarque du coup de par la façon dont il créé bon nombre d’ellipses dans un récit se déroulant en temps réel en concentrant toujours ses énergies sur une seule action. Le cinéaste iranien a toutefois quelques difficultés à gérer la longueur de certaines séquences et créer, par le fait même, une rythmique moindrement soutenue qui aurait été franchement la bienvenue dans ce cas-ci.

Cette bévue est d’ailleurs tributaire d’un scénario s’intéressant davantage à sa mise en situation qu’à ses personnages. Au départ, Panahi et le scénariste Shadmehr Rastin nous lancent dans la mêlée en désignant certaines figures comme principaux protagonistes, allant même jusqu’à les unir en suggérant certains liens (familiaux). Le duo finit par contre par lâcher prise après quelques scènes pour aboutir dans un fourre-tout débordant de contradictions. Certaines d’entre-elles sont parfois justifiables alors que d’autres donne l’impression que Panahi continue d’avancer sans trop savoir où il va. Il devient alors difficile de déterminer quel public Jafar Panahi tente de rejoindre. Ainsi, cet effort parfois maladroit dans sa prudence n’inspirera sûrement pas le débat de société qu’il cherche à créer et finira plutôt par séduire quelques jurys de festivals un peu partout à travers le monde pour sa débrouillardise et son courage. Autrement, la force d’impact d’Offside est difficilement mesurable, mais sa réussite signifierait tout de même un pas dans la bonne direction.




Version française : -
Scénario : Jafar Panahi, Shadmehr Rastin
Distribution : Sima Mobarak-Shahi, Shayesteh Irani, Ayda Sadeqi, Golnaz Farmani
Durée : 93 minutes
Origine : Iran

Publiée le : 18 Octobre 2006