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MONSIEUR IBRAHIM ET LES FLEURS DU CORAN (2003)
François Dupeyron

Par Alexandre Fontaine Rousseau

S'il est une culture qui n'a pas droit à une couverture médiatique positive par les temps qui courent, c'est bien la culture musulmane. Pourtant, derrière les images de terroristes assoiffés de sang et d'intégristes religieux intransigeants diffusées par CNN se cache un univers unique, beaucoup plus beau et serein que certains n'aimeraient le faire croire. C'est justement ce que tente de faire découvrir le noble Monsieur Ibrahim et les fleurs du Coran. Petite histoire d'amitié entre un jeune juif et un vieil épicier musulman, le film est un joli plaidoyer en faveur de la tolérance souffrant toutefois de quelques ambigüités étranges qui laissent finalement un gout un peu amer en bouche. Car autant le film nous offre une vision poétique et respectueuse de la religion musulmane, autant le judaïsme y est présenté sans aucune subtilité, dans l'ombre et la mauvaise humeur du foyer sans amour du jeune Moïse.

C'est dans cet univers misérable que le jeune homme grandit, écrasé par un père tyrannique et pessimiste qui le compare toujours en mal à un grand frère disparu depuis longtemps. C'est par l'entremise d'Ibrahim, l'épicier arabe du quartier, que le jeune Juif découvrira la religion du prophète Mahomet et le Coran, mais surtout la beauté de l'existence. Car Moïse trouvera en Ibrahim un vrai père débordant d'amour, capable de lui offrir une vision du monde et l'espoir en abondance. Monsieur Ibrahim et les fleurs du Coran est sans contredit un beau film, une oeuvre riche en bons sentiments et en paysages superbes, une histoire douce sur la vie et ses charmes, pleine de femmes et de sourires optimistes tempérés par une mélancolie qui équilibre le tout avec justesse. D'un autre côté, le film de François Dupeyron demeure bourré de clichés, de la pute au coeur d'or jusqu'au méchant père absorbé par le travail, qui en font une histoire aussi prévisible qu'elle est humaniste.

Mais c'est vraiment Omar Sharif qui, dans le rôle d'Ibrahim, confère tout son charme au film. Car c'est son jeu posé, nuancé et profondément humain qui fait du film un voyage si agréable. Mais Monsieur Ibrahim et les fleurs du Coran n'est pas exempt de défaut, à commencer par cette fin abrupte qui coupe un peu court le périple si bien entamé, et parait quelque peu facile. Mais c'est surtout par certaines zones grises idéologiques que le film laisse sceptique, à commencer par le fait que l'union si symbolique des deux cultures se fait par la conversion de Moïse à la religion musulmane, qui devient justement Mohammed pour renier sa mère. C'est seulement une fois ses origines juives rejetées que le jeune homme accède véritablement au bonheur et arrive à savourer pleinement la vie et à en comprendre la beauté. En guise de fin, Moïse remplace Ibrahim et devient lui-même «l'épicier arabe» du coin. Étrange conclusion à un conte sur la tolérance.

Monsieur Ibrahim et les fleurs du Coran demeure une belle histoire bien racontée qui gagne en puissance lorsque l'on pense que les deux peuples qui s'y entendent si bien s'entre-déchirent depuis si longtemps devant d'autres caméras. De plus, le film de Dupeyron a le mérite de montrer sous un meilleur jour une culture injustement victime de certains préjugés qui mérite d'être explorée avec une plus grande ouverture d'esprit. Même si certains diront que la religion est la source même de tous les maux de ce monde, Monsieur Ibrahim remet un peu les pendules à l'heure en présentant justement un croyant prêt à en prendre et à en laisser à sa guise. Finalement, n'est-ce pas plutôt l'intégrisme obtus et l'organisation religieuse stricte et hermétique qui est au coeur de toutes les misères actuelles? Si l'on se contente de le prendre comme il se présente, sans le scruter à la loupe, ce Musulman capable de savourer un apéritif sans remord peut apprendre une chose ou deux et faire passer un beau moment...




Version française : -
Scénario : François Dupeyron, Eric-Emmanuel Schmitt (roman)
Distribution : Omar Sharif, Pierre Boulanger, Gilbert Melki, Isabelle Renauld
Durée : 94 minutes
Origine : France

Publiée le : 23 Septembre 2004