A B C D E F G H I
J K L M N O P Q R
S T U V W X Y Z #
Liste complète



10 - Chef-d'oeuvre
09 - Remarquable
08 - Excellent
07 - Très bien
06 - Bon
05 - Moyen
04 - Faible
03 - Minable
02 - Intolérable
01 - Délicieusement mauvais



Cotes
Décennies
Réalisateurs
Le Cinéma québécois
La Collection Criterion



2005
2006
2007
2008
2009

KUNG POW : ENTER THE FIST (2002)
Steve Oedekerk

Par Jean-François Vandeuren

Il y eu un temps à la fin des années 90 où les comédies ont pris un virage qui n’était pas du tout à leur avantage. Du même coup, les films du genre élaborés par des cinéastes donnant dans un humour plus subtil et recherché voyaient leurs productions sortir en salles elles aussi dans la subtilité. À l’opposé, et concordant avec le plus grand des hasards (!) à la popularité fleurissante des films d’ados, plusieurs comédies arrivèrent fastueusement sur nos écrans, nous amenant à nous questionner sur l’existence d’une course à Hollywood où un prix serait décerné au film qui réussiraient à atteindre le plus bas niveau de décence et d’intelligence en se basant sur ce qu’on appelle dans le jargon le «toilet humor». Les stéréotypes de ce genre nous viennent facilement en tête. On n’a qu’à penser à la série Scary Movie et la quête est terminée. Toutefois, un homme est parvenu à atteindre le summum de la stupidité, du ridicule et de l’absurde. Et pourtant, il a réussi son coup en passant par un tout autre chemin, se basant plutôt sur l’utilisation du son et de l’image. Il en résulte probablement une des comédies les plus imbéciles de tous les temps, mais aussi une des plus efficaces depuis un bon moment déjà.

Aussi adulé que profondément détesté, Kung Pow demeure pour ceux qui voudront bien lui laisser sa chance une des comédies les plus absurdes et désopilantes que le nouveau millénaire à eu à nous offrir jusqu’à maintenant, impliquant de ce fait son lot de crampes d’estomacs et de maux de mâchoire chroniques chez les spectateurs qui riront jusqu’à en pleurer et que plus aucun son ne sortent de leur bouche, laissant seulement cette bête expression sur leur visage. C’est le genre de réactions que Kung Pow réussit à créer sans aucune difficulté et, dans ses moments les plus inspirés, à soutenir pendant de très longues minutes.

Ce qui fait de Kung Pow une comédie qui parvient à arracher si facilement les rires de son public se retrouve au niveau de la composition des gags en soi. Ici, le cinéaste américain Steve Oedekerk utilise sensiblement le même stratagème que Woody Allen avait élaboré pour son What’s Up Tiger Lily?, reprenant un vieux film chinois comme toile de fond en en reformulant complètement la traduction, et le sens par la même occasion. Mais Oedekerk pousse l’initiative encore plus loin avec sa reprise parodique du film de kung fu Tiger and Crane Fist de Yu Wang en s’introduisant à sa guise dans le film en plus de quelques nouvelles scènes tournées pour le bien de la cause.

On y retrouve bien évidemment la caricature habituelle du décalage entre la traduction et le mouvement des lèvres des vrais acteurs, mais Oedekerk joue aussi de finesse au niveau technique. Il s’amuse ainsi avec l’utilisation d’effets sonores complètement inappropriés, l’intonation de ses personnages, les dialogues qui souvent ne veulent absolument rien dire, etc. Le cinéaste s’amuse également avec son visuel, principalement au niveau du montage, en y allant de figement d’image, de répétitions du même court segment, et que dire de l’utilisation plus qu’abusive du zoom lors de cette fameuse confrontation entre «l’élu» et une meute de guerriers peu efficaces. Tout simplement tordant! Ces aspects ne sont pas sans rappeler quelque part ce qu’on fait à une certaine époque les Monty Python, plus spécifiquement dans leur chef-d’œuvre The Holy Grail. Malheureusement, Kung Pow est un film qui a tendance à quelque peu s’essouffler, surtout durant la seconde moitié du film. Mais le plus surprenant est que malgré tout, ces quelques scènes moins consistantes demeurent aussi mémorable que les élans les plus tordants de l’effort de Steve Oedekerk, en faisant au bout du compte une parodie qui n’est pas sans fautes, mais qui parvient à les rattraper par l’équilibre qui y est créé.

Totalement con et insignifiant, mais aussi totalement hilarant, Kung Pow forme en définitive une farce qui réussit à ne pas tomber dans les pièges des comédies préfabriquées pour un public peu exigeant ou simplement juvénile. Oedekerk a su élaborer ses gags d’une manière plutôt ingénieuse en utilisant le côté technique de sa mise en scène pour nous offrir une comédie qui fonctionne à merveille même dans ses moments les moins inspirés. Comme tout bon film du genre, il est impossible de ne pas se remémorer après coup certains fragments de la narration bidonnante ou des dialogues plus insignifiants les uns que les autres imaginés par le créateur de la série des Thumbs. À voir idéalement en français, entre amis et avec une bonne dose de substances illicites afin de pleinement apprécier le travail de traduction semblant avoir été fait un jeudi soir par une bande d’étudiants un peu saouls. De l’absurde à son meilleur.




Version française : Kung Pow : Le Grand Poing
Scénario : Steve Oedekerk
Distribution : Steve Oedekerk, Tad Horino, Joon B. Kim, Woon Young Park
Durée : 81 minutes
Origine : États-Unis

Publiée le : 4 Août 2003