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THE GREEN BUTCHERS (2003)
Anders Thomas Jensen

Par Alexandre Fontaine Rousseau

Svend et Bjarne viennent d'ouvrir une boucherie mais les affaires ne lèvent pas. C'est le soir où Svend oublie un électricien dans la chambre froide de son commerce que le vent tourne pour la jeune entreprise. Le lendemain, pour se débarrasser du corps, le boucher perturbé décide de couper une douzaine de filets de "poulet" et de les vendre à son ancien employeur venu le narguer. Bientôt, tout le village a déserté la compétition et se retrouve chaque jour chez Svend et Bjarne pour acheter ces délicieux ''chicky-wickies'' à la marinade mystère qui font fureur. Une fois le premier cadavre écoulé, les deux hommes doivent cependant trouver une nouvelle façon de s'approvisionner en chaire humaine.

Le prolifique scénariste danois Anders Thomas Jensen est responsable de Mifune et The King Is Alive, deux des quatre premiers films du fameux mouvement Dogme 95, lancé par Lars Von Triers et Thomas Vinterberg en réponse à une certaine tendance artificielle du cinéma actuel. Pour son cinquième film à titre de réalisateur, Thomas Jensen se vautre, sans aucune pitié pour la santé mentale du public, dans l'humour noir le plus sordide qui soit. Morbide à souhait, The Green Butchers déstabilise par son traitement pince-sans-rire et froid d'une histoire tout bonnement mortifiante. Entre la fable d'horreur et la comédie insolite, The Green Butchers s'amuse à créer l'inconfort.

Au-delà de l'éthique douteuse de nos deux marchands, c'est surtout la relative normalité avec laquelle Anders Thomas Jensen filme leurs agissements qui confère au film son atmosphère glaciale. Jouant sur des teintes désincarnées et maladives de verts et de bleus, la direction photo délavée de Sebastian Blenkov fait preuve d'une propreté clinique accentuant la cruauté inhumaine des événements. Avec son faciès inquiétant et torturé rappelant vaguement celui de Christopher Walken, l'acteur Mads Mekkelsen ajoute lui aussi à l'aura inquiétante de l'ensemble.

Mais si les volets humour et horreur de l'équation fonctionnent de pair avec une aisance remarquable, il n'en va pas de même pour le drame familial nourrissant le personnage de Bjarne. Le traitement simpliste de sa relation avec son frère déficient laisse à désirer et détourne notre attention de la fable surréaliste se tramant dans l'arrière-boutique de la boucherie. Le cynisme carnassier de Thomas Jensen est plus convaincant que ses tentatives d'être touchant. En ce sens, ses personnages s'avèrent plus intéressants en tant que caricatures qu'en tant que créatures psychologiques incarnées. Svend est plus amusant que Bjarne même si nous sympathisons davantage avec ce dernier.

En guise de morale, cette petite comédie amorale glisse quelques pointes cinglantes contre la mentalité capitaliste décadente. C'est l'obsession de la gloire qui pousse nos deux joyeux bouchers à poursuivre leurs pratiques douteuses et, lorsque Bjarne le confronte pour la première fois, Svend défend ses agissements en affirmant que ce sont les désirs du consommateur qui dictent la conduite à adopter. Somme toute, The Green Butchers n'a rien d'un grand film mais propose malgré tout une expérience particulière et surprenante. À défaut de soutirer le plein potentiel de son intrigue déstabilisante, cette comédie danoise s'avère assez unique pour amuser les amateurs d'humour noir qui savent qu'un peu de méchanceté ne fait pas de mal...




Version française : -
Version originale : De Grønne slagtere
Scénario : Anders Thomas Jensen
Distribution : Line Kruse, Nikolaj Lie Kaas, Mads Mikkelsen, Nicolas Bro
Durée : 100 minutes
Origine : Danemark

Publiée le : 17 Février 2006