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CRASH (2005)
Paul Haggis

Par Louis-Jérôme Cloutier

Après avoir connu un triomphe, qui risque finalement d’être très éphémère, avec Million Dollar Baby, ce film regrettablement surévalué de Clint Eastwood, Paul Haggis revient sur un projet plus intéressant qu’il a réalisé et co-scénarisé. Et il semblerait que ce scénario fut suffisamment captivant pour pousser plusieurs «vedettes» à y participer sans exiger le même cachet qu’à l’habitude. Vedette est tout de même un grand mot, car hormis Don Cheadle, on ne retrouve aucun acteur véritablement chevronné et ayant fait ses preuves. Matt Dillon, Ryan Phillipe, Brendan Fraser, etc. Des acteurs qui ont surtout connu de bonnes périodes dans des films ordinaires avant de retomber dans l’oubli, et Sandra Bullock qui n’a jamais participé à un projet de cette envergure dramatique. Même le chanteur hip-hop Ludacris a décidé de joindre la partie!

Paul Haggis nous présente une histoire se déroulant sur un peu moins de 48 heures à Los Angeles. On y suit le parcours de plusieurs personnes, provenant toutes de minorités et de classes sociales différentes dont les chemins s’entrecroisent sur fond de racisme, d’intolérance et de violence. À en croire le film d’Haggis, qui ne verse pas beaucoup dans la subtilité, Los Angeles est une ville rongée par le cancer, et celui-ci prend diverses formes. Véritable creuset de gens de nationalités différentes, la ville n’offre que des conflits entre les individus. Évidemment, le scénario nous amène uniquement à suivre des gens qui se retrouvent dans ce type d’affrontements raciaux ou strictement sociaux. C’est le point majeur du film, c’est ce dont il traite très exactement à un moment qui ne pouvait être mieux choisi. Force est d’admettre qu’une bonne part du film s’avère réussi, certaines scènes sont émouvantes et arrivent à créer l’impact voulu par Haggis. Mais si quelques-unes des «histoires», qui combinées forment un récit cohérent sont réussites, d’autres prise individuellement sont plutôt très banales. Notamment, celle impliquant le personnage de Sandra Bullock ne vaut tout simplement rien.

Un peu comme Million Dollars Baby, Crash est un film bien moins profond qu’il ne l’est vraiment. Plusieurs des personnages sont construits de façon simpliste, prisonnier de leur archétype, plusieurs situations paraissent forcées et tirées par les cheveux et on ne ressort pas de la salle en ayant subi une véritable leçon, alors que c’était probablement l’un des buts importants du film. Car par les problèmes évoqués précédemment, et par sa dentelle hollywoodienne, Crash est finalement un film grand public plutôt qu’une réflexion sérieuse, et on ne le prend justement pas au sérieux, mais plutôt comme un divertissement à peine plus songé que la moyenne. Surtout que Haggis nous laisse avec une sorte de suspens, sans dresser un véritable constat qui aurait paru nécessaire. Ajoutons qu’en se concentrant sur plusieurs personnages en seulement deux heures, il devient quasiment impossible de leur ajouter suffisamment de profondeur. On devient donc plutôt indifférent à leur sort, comme si le fait de les avoir vus pendant quelques minutes dans une certaine scène pouvait totalement conditionner notre réaction émotionnelle dans la prochaine. En réalité ça ne marche pas toujours.

N’empêche, avouons que Crash brosse un portrait quand même pertinent de la réalité nord-américaine. L’entre-croisement est bien amené sans être poussé au-delà des limites du possible. Également, Paul Haggis est un réalisateur habile offrant un film qui s’inspire beaucoup du travail de Micheal Mann sur Collateral, possédant une photographie presque aussi intéressante. La distribution est de bonne qualité, Haggis semble être parvenu à sortir le meilleur de quelqu’un de ces acteurs qui n’ont jamais été reconnus comme véritablement capables de jouer dans une production dramatique sérieuse, tel que Ryan Phillipe. Don Cheadle est égal à lui-même, c’est à dire très bon et Matt Dillon offre une performance étonnamment nuancée. Côté musical, la trame sonore de Mark Isham enveloppe le film d’une sorte de douce mélancolie tout à fait approprié.

Crash est loin d’être un mauvais film, mais tout aussi loin d’être une grande production. Paul Haggis est un scénariste que je n’apprécie pas vraiment personnellement, ses histoires tendent toujours à paraitre mieux qu’elles ne le sont vraiment. Car le plus gros problème de Crash, c’est d’être finalement, à l’image de certains de ses personnages, superficiel et de ne pas avoir réussi à dire grand chose, malgré en avoir montré beaucoup. Terminons par la réflexion la plus valable du film à mon avis, celle qui sert de tagline au film: on croit savoir qui nous sommes, mais en fait, nous n’en avons aucune idée.




Version française : Crash
Scénario : Paul Haggis, Robert Moresco
Distribution : Don Cheadle, Sandra Bullock, Matt Dillon, Thandie Newton
Durée : 113 minutes
Origine : États-Unis

Publiée le : 15 Mai 2005