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BATMAN FOREVER (1995)
Joel Schumacher

Par Alexandre Fontaine Rousseau

Dieu seul sait pourquoi c'est à Joel Schumacher qu'incomba la tâche de faire suite aux excellents Batman et Batman Returns de Tim Burton. Tâcheron maladroit cultivant sans gêne la démesure de mauvais gout, Schumacher s'est imposé au fil des ans comme l'un des pires réalisateurs à avoir obtenu la grâce des studios hollywoodiens. Jetant par-dessus bord les fabuleuses teintes gothiques du précédent volet des aventures du justicier masqué de Gotham City, il tente avec son Batman Forever de revenir au style plus naïf et coloré de la vieille série télé des années soixante. L'exercice ressemble souvent à une mauvaise blague, d'autant plus que son film s'appuie sur un scénario carrément déficient ainsi que sur un style visuel franchement inégal et plus souvent qu'autrement raté. Bref, sans sombrer dans les mêmes sphères de ridicule consommé que l'atroce Batman & Robin de 1997, Batman Forever s'impose comme le début d'une dure chute pour la série entamée de façon remarquable en 1989.

Tout de ce troisième Batman n'est pas foncièrement désagréable. Certaines qualités rédemptrices, à commencer par la charmante Nicole Kidman, arrivent presque à racheter les idées saugrenues de Schumacher et de son département artistique friand de néons et de latex. Malgré plusieurs erreurs de caractérisation, ainsi que le douteux choix de Val Kilmer dans le rôle de Bruce Wayne, la plupart des personnages demeurent amusants. Tel que l'avait fait Burton dans ses films, Schumacher dirige ici ses projecteurs sur sa galerie de démoniaques super-voyous de service.

Difficile de retenir Jim Carrey, qui cabotine joyeusement du début à la fin du film sans pour autant arriver à détrôner le Joker de Nicholson. De son côté, Tommy Lee Jones incarne un Two-Face tristement unidimensionnel alors que l'on s'attendait à tout le moins à ce que son personnage ait deux facettes. Malheureusement, le film se borne à transformer un personnage potentiellement intéressant en caricature hystérique. L'accent est mis sur le yang et non sur l'équilibre déséquilibré de cette créature instable. Mal desservi par le scénario, Jones se tire somme toute bien d'affaire et s'amuse visiblement avec le matériel qui lui est offert.

En fin de compte, c'est plutôt l'allure générale du film ainsi que l'intégration mal orchestrée du personnage de Robin à la série qui font regretter amèrement la touche magique de Burton. Les plans bigarrés qu'affectionne Schumacher sont en parfaite harmonie avec l'horrible palette de couleurs fluorescentes qui est à l'honneur ici. Cet ensemble hyperactif n'a rien de la sombre majesté de Batman Returns et n'arrive jamais au même juste équilibre que le Batman de 1989. Au contraire, le film de Schumacher est bruyant et tapageur et teste les limites de la patience humaine. Que le scénario cultive par contraste les longueurs ennuyeuses, surtout lorsqu'entre en jeu Dick Grayson et son alter ego, a de quoi confondre le spectateur. Mais Schumacher centre de toute façon son film autour de multiples scènes d'action filmées comme un mauvais vidéo-clip.

Pourtant, l'ensemble s'écoute encore sans peine pour d'obscures raisons que l'on arrive difficilement à justifier. Si certains plans sont risibles et l'approche visuelle peu ingénieuse, Batman Forever n'échoue pas complètement dans sa tentative d'offrir un gros produit commercial plus ludique que ces prédécesseurs. En bout de ligne, ce troisième Batman s'avère un échec sans pour autant être insoutenable. C'est un compliment fort relatif dans sa valeur, mais il prend tout son sens lorsque l'on repense au terrifiant Batman & Robin. Aux côtés de cette débile ode au mauvais gout et à l'excès, Batman Forever fait figure de chef-d'oeuvre de retenu et d'intelligence. N'en demeure pas moins que c'est le début de la fin pour l'homme chauve-souris.




Version française : Batman à jamais
Scénario : Lee Batchler, Janet Scott Batchler, Akiva Goldsman
Distribution : Val Kilmer, Tommy Lee Jones, Jim Carrey, Nicole Kidman
Durée : 122 minutes
Origine : États-Unis

Publiée le : 26 Juin 2005