A B C D E F G H I
J K L M N O P Q R
S T U V W X Y Z #
Liste complète



10 - Chef-d'oeuvre
09 - Remarquable
08 - Excellent
07 - Très bien
06 - Bon
05 - Moyen
04 - Faible
03 - Minable
02 - Intolérable
01 - Délicieusement mauvais



Cotes
Décennies
Réalisateurs
Le Cinéma québécois
La Collection Criterion



2005
2006
2007
2008
2009


ANYTHING ELSE (2003)
Woody Allen

Par Alexandre Fontaine Rousseau

Depuis longtemps, on accuse Woody Allen de radoter le même film. On affirme haut et fort que ses auteurs en panne d'inspiration et les femmes qui les aiment n'ont plus rien à dire. Depuis quelques années, le vieux Woody avait rétorqué à cette critique en effectuant un retour aux comédies légères des premiers temps. De cette réaction sont nés des films tels que Small Time Crooks et The Curse of the Jade Scorpion. Des films simples et naïfs qui, en gros, n'offraient rien de neuf mais ne semblaient pas non plus être troublés outre mesure par leur insignifiance somme toute sympathique.

Règle générale, on en veut surtout à Allen de toujours jouer le même rôle. Il est donc ironique que cet Anything Else, où son personnage est d'une certaine manière l'antithèse de tout ce qu'il affirme habituellement, soit son film le plus prévisible et redondant depuis des lustres. Anything Else reprend presque un à un les thèmes d'Annie Hall, au point où l'on croit même voir le vieux réalisateur poussant son jeune alter ego Jason Biggs à ne pas répéter les erreurs que commettait dans le passé Alvy, c'est-à-dire à ne s'attacher à rien, surtout pas à une ville où à une femme. L'humoriste s'attaquait autrefois à la Californie. Aujourd'hui, il y envoie son protégé presque contre son gré.

Malheureusement, il ne se cache ici presque rien d'intéressant au-delà de cet étrange revirement de situation. Anything Else, c'est du Woody Allen à son plus paresseux où l'inimitable New-yorkais nous régurgite sans grande inspiration quelques délires amoureux prédigérés avec en arrière-plan des paysages de carte postale de sa ville fétiche, sans l'inspiration d'antan, cela va sans dire. Si Allen se permet de cabotiner joyeusement dans un contre-emploi gâteux, c'est qu'il donne ici à Jason Biggs son propre rôle question d'éviter les commentaires de grand-père pervers qui ont marqué les dix dernières années de sa carrière.

Mais il ne fait aucun doute que le Jerry Falk qu'interprète la jeune vedette d'American Pie est une autre incarnation détournée d'Allen, dans la même veine que le Lee Simon de Celebrity et que le David Shayne de Bullets Over Broadway. Exception faite de Danny DeVito, Allen confie ici la majeure partie de ses rôles à une distribution plus jeune qu'à l'habitude. Sauf que cette opération de rajeunissement ne s'effectue qu'en surface avec comme résultat final une scène absurde où une bande de jeunes se retrouve à un concert de Diana Krall, qui vend habituellement des automobiles aux pères de famille en pleine crise de quarantaine.

"Even an old broken clock is right twice a day."

Ce gag que glisse Allen dans un des échanges entre Dobel et Falk s'applique heureusement à Anything Else. Même un Allen douteux tel que celui-ci a ses bons moments. C'est d'ailleurs le personnage de Dobel, un vieil humoriste un peu fou qui voit de l'antisémitisme dans sa soupe, qui fournit la majeure partie de ceux-ci. Cependant, l'absence totale de chimie entre Biggs et Christina Ricci rend tout le pan du film qui leur est consacré maladroit et tristement unidimensionnel. Tant et si bien que leur intrigue amoureuse devient carrément secondaire malgré tout le temps d'écran qui lui est consacré.

Vers la fin d'Anything Else, Falk ne parle plus que de Dobel. Sa relation avec Amanda est devenue secondaire à celle qu'il entretient avec son mentor détraqué. Woody Allen a raté son coup. Il n'arrive jamais à rajeunir son éternel archétype de l'amoureux névrotique et s'avère incapable de concentrer sa caméra sur quelqu'un d'autre que lui-même. Les inaliénables fanatiques du célèbre juif à lunettes seront certainement amusés. Mais Anything Else demeure une comédie moyenne, écrite sans grande finesse et sans grande inspiration, qui donne au mieux le goût de revoir pour la millième fois Annie Hall.




Version française : La Vie et tout le reste
Scénario : Woody Allen
Distribution : Jason Biggs, Christina Ricci, Woody Allen, Stockard Channing
Durée : 108 minutes
Origine : États-Unis

Publiée le : 13 Décembre 2005