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AMERICAN SPLENDOR (2003)
Shari Springer Berman
Robert Pulcini

Par Jean-François Vandeuren

En 2001, le cinéaste Terry Zwigoff élevait au grand écran, avec son adaptation de la bande dessinée indépendante Ghost World, un regard antipathique du point de vue de deux adolescentes impopulaires sur la vie moderne et de tout ce qui fait de l’être humain un personnage emmerdant à mourir. Avec American Splendor, deux réalisateurs ordinairement spécialisés dans la confection de documentaires portent cette fois-ci un regard biographique sur un homme tout ce qu'il y a de plus commun, Harvey Pekar, créateur d'une bande dessinée traitant du même genre de sujets, d’où le titre du film. Pourquoi le parallèle entre les deux oeuvres? Disons que toutes deux décortiquent sensiblement les mêmes thématiques et petits détails de l'agissement de l'homme avec un regard corrosif, créant dans les deux cas une satire bien intéressante sur les enjeux de la vie moderne.

La vie ordinaire est quelque chose d’assez complexe nous dit Harvey Pekar. On retrace donc à partir du début de la création de sa bande dessinée le cheminement et les raisons qui ont poussé ce dernier à se lancer dans une telle aventure. Archiviste de métier, cet homme, probablement un des plus antipathiques et maussades qu'il fut possible de voir dans un film depuis fort longtemps, nous livre ses pensées et nous explique pourquoi il est rendu si difficile de nos jours de joindre les deux bouts. N'ayant aucun talent au niveau du dessin, il s'associera à un artiste bien connu de ce domaine en la personne de Robert Crumb, qui fut d'ailleurs le sujet principal d'un documentaire fort intéressant de Terry Zwigoff il y a de cela une dizaine d'années.

Ne s’aventure pas dans ce genre de film qui le veut bien. Ne vous attendez pas à d’incroyables rebondissements ou à des effets dramatiques à n'en plus finir: vous allez vraiment vous ennuyer. C’est un film passablement lent qui se concentre plutôt sur la mise en scène d’un regard honnête sur un homme qui ne réussit pas à organiser une vie tout ce qu’il y a de plus simple. Mais justement, est-ce que c’est aussi anodin que le monde entier essaie de nous le faire croire? Pour répondre à cela, on nous montre la vie quotidienne comme elle est la majeure partie du temps, paraissant souvent bien longue, où les minutes s’étirent à perte de vue, où les extravagances et sources d’intérêts peuvent se faire rares lorsqu’on décide de ne pas se lancer tête première dans le divertissement de masse pour oublier ses problèmes.

D'autre part, les cinéastes Pulcini et Berman font bon usage de la construction de ce récit en mélangeant à la fois la réalité et la fiction. D’un côté, nous avons une excellente distribution incarnant Harvey Pekar et son entourage, et de l’autre, on se retrouve avec l’artiste en personne et les gens se cachant derrière les divers personnages présentés au cours du film. Trouvaille intéressante et bien dosée laissant la parole à M. Pekar pour que celui-ci puisse parler de son vécu, et non pas seulement laisser un travail de fiction complètement le faire à sa place. Bonne mise en scène également au niveau du visuel. Bien sûr, on se retrouve face à un résultat beaucoup plus théâtral qu'autre chose, mais n'empêche qu'il s'agit d'une conception fort sastisfaisante et dans le bon ton. L’utilisation prédominante de couleurs fades tels le brun et le beige vient bien appuyer l’esprit de monotonie du film.

American Splendor constitue donc une belle trouvaille dans une année plutôt vide jusqu’à maintenant côté cinéma. Un film assez lent, mais au récit tout de même fort bien construit. Si vous avez de l’intérêt pour ce genre de thématiques et que vous avez bien aimé Ghost World, vous risquez d’y trouver votre compte. Peut-être un bémol par contre où ce n'est toutefois pas une oeuvre qui risque de dégager un certain attrait éternellement après une première visite. Quitte à l'explorer de nouveau une ou deux fois encore, mais sans plus. Mais n'empêche qu'il en ressort en final un boulot fort bien nanti.




Version française : American Splendor
Scénario : Shari Springer Berman, Robert Pulcini
Distribution : Paul Giamatti, Harvey Pekar, Hope Davis, Joyce Brabner
Durée : 100 minutes
Origine : États-Unis

Publiée le : 1er Septembre 2003